Résumé
L’écrivain Pascal Quignard offre aux auditeurs du Collège de France une réflexion en deux temps. Il propose d’abord une brève histoire de la « défense de l’oublié », une nouveauté qui trouve ses racines dans la Révolution française et se construit au cours des XIXe et XXe siècles, avec l’émergence des sciences sociales, qui furent attentives au folklore, à l’archéologie de la langue et leur attention aux langues perdues (les études indo-européennes), ou encore la psychanalyse, qui fut attentive aux « pertes » de la conscience. Le deuxième temps de l’intervention de Pascal Quignard est consacré à une réflexion poétique sur son propre rapport à la perte et à l’oubli. Il évoque sa relation avec son frère, ainsi que son amitié avec le musicien Jordi Savall, qui fit beaucoup pour faire revenir la musique perdue de Sainte-Colombe, musicien génial du XVIIe siècle, au centre du roman Tous les matins du monde, dont Jordi Savall lui-même joua les compositions pour l’adaptation cinématographique du roman par Alain Corneau. Le travail d’édition de textes perdus ou oubliés est au cœur de la démarche de Pascal Quignard, qui déploie dans ce séminaire une théorie poétique de la littérature comme « art du cryptage ».