Résumé
Cette présentation s’est attachée à chercher dans le best-seller de Simine Dāneshvar, première romancière iranienne du XXe siècle, les traces laissées par l’épopée de Ferdowsi.
Ces traces auraient pu sembler dans un premier temps n’être qu’un jeu de références plus ou moins explicites, la fiction de Dāneshvar aurait pu être considérée comme puisant une légitimité, une force et un poids dans les princes et les rois de l’épopée, au premier rang desquels Siyāvush et Key Khosrow. Et c’est ce que Dāneshvar fait en partie, en affirmant la puissance de la poésie et en plaçant son texte dans une position de résistance par l’écriture, qui permet la subsistance des héros anciens.
Mais ce texte, paru en 1969, l’année de la mort de Āl-e Ahmad, son époux et autre figure tutélaire planant sur la vie et l’œuvre de Dāneshvar, nous est apparu peu à peu comme une affirmation dans le même temps des libertés que prenait l’écrivain par rapport aux pesanteurs d’une tradition masculine et séculaire. Par une série d’infimes détournements des personnages, Dāneshvar retourne en effet complètement les figures mythiques et positives du Livre des rois, et tout particulièrement celle de Siyāvosh/Youssef, pour donner à son héroïne féminine la possibilité de prendre en charge la contestation et l’opposition face aux forces d’occupation (en l’occurrence britanniques) de l’Iran. Ainsi la résistance poétique permet-elle la survie des héros anciens, mais également l’avènement des héroïnes modernes.