La cinquième leçon est partie du constat et des nouveaux enjeux qu’avait ainsi permis de dégager l’analyse précédente, en illustrant ce défi qu’est, pour le projet, celui des rapports entre métaphysique et science, par l’examen de la situation à laquelle se trouverait précisément confrontée la philosophie de la connaissance (censée être a priori) face aux sciences de la cognition (jugées a posteriori). On a rappelé les exigences à satisfaire : distinguer connaître et comprendre ; réhabiliter l’a priori après quine ; expliciter le sens à donner au concept de « naturalisme » ; repenser la valeur épistémique de l’intuition ; redélimiter le domaine de l’a priori ; repenser les formes de normativité, et voir notamment si certaines de ses formes ne sont pas déjà présentes dans la nature – en d’autres termes, voir si l’on peut redonner corps à la troisième voie envisagée par kant mais rejetée par lui en raison du modèle qui est encore le sien de la science comme apodictique, et de l’absence d’universalité et de nécessité qu’auraient alors eues les catégories, retrouver donc l’inspiration de la voie d’un « système de préformation de la raison pure ».
La séance a notamment permis de préciser les divers sens à l’œuvre dans les concepts de « normativité » et de « normes », et de distinguer des normes : (1) comme règles de signification, (2) comme propres à des concepts ; (3) comme engagements ou pré-requis normatifs de rationalité ; (4) comme justifications ou raisons ; (5) enfin des normes générales de la connaissance et de l’enquête (P. Engel). Une fois indiquées les précautions à prendre en fonction de tel ou tel usage qu’on peut faire de ces concepts, on s’est alors penché sur la question de savoir si l’on peut parler de « normes dans la nature ». Plusieurs conséquences ont été tirées de cet examen : la connaissance n’est pas la cognition ; les sciences cognitives permettent en général de distinguer deux axes de complexité dans la « normativité » que l’on peut assigner au mental, selon qu’on se place au niveau représentationnel ou au niveau métacognitif (J. Proust). Mais il semble nécessaire de maintenir une « hiérarchie » entre les états mentaux. Une autre délimitation du mental peut se faire à partir des enseignements que l’on peut tirer des développements récents de la philosophie de la connaissance (abordés l’an passé) qui, à certains égards, viennent à la « rescousse » des sciences de la cognition. On a indiqué quatre modifications importantes dans l’histoire récente de ce domaine : les questions soulevées par certaines limites du fiabilisme (A. Goldman) ; l’essor de l’épistémologie des vertus ; l’essor de la conception de la connaissance comme état mental (T. Williamson) ; la transversalité de nombreuses questions, en concluant sur l’une des pistes les plus fécondes aujourd’hui pour qui veut « sauver » l’a priori et en redélimiter les contours, à savoir, l’analyse menée, en épistémologie, sur le concept « d’avoir droit épistémique » (entitlement) qui, dès le seuil de la perception, constituerait déjà une forme (certes non déployée) de justification.