Amphithéâtre Maurice Halbwachs, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Une séance du Sénat romain qui eut lieu en 20 apr. J.-C., sous Tibère, nous permet d’étudier le rapport entre droit et morale. Tacite (Ann., 3, 25), qui nous la rapporte, évoque les conséquences de la loi Papia Poppaea, votée en 9 apr. J.-C. sous l’impulsion d’Auguste, pour renforcer la loi Iulia de maritandis ordinibus (18 av. J.-C.), qui encourageait les mariages. Des mesures concernent la transmission du patrimoine, notamment les biens devenus caducs en l’absence de successeurs, revenant ainsi au trésor public : en plus d’inciter à la procréation, la loi Papia Poppaea créait ainsi de nouvelles ressources fiscales. Tout citoyen pouvait revendiquer au trésor public le bien resté caduc : Tacite évoque alors les conséquences néfastes de cette délation et surtout la mise en danger des patrimoines. Une métaphore médicale dépeint les effets de la loi : les remèdes sont pires que les maux. Pour Tacite, les lois, d’abord impuissantes à freiner les mauvaises mœurs, sont ensuite contaminées par elles. L’échec du remède, l’impuissance de la loi (un phénomène déjà déploré par Plaute, Trin., 1039-1040), se manifeste dans la multiplication des lois, tout comme les médicaments se multiplient en fonction de la diffusion des maladies (Sen., Ep., 95, 15). Pour expliquer cette hypertrophie législative, Tacite remonte aux principia iuris, comme Cicéron avant lui et Gaius après lui : le passé devient un outil de compréhension. Tacite évoque une dynamique régressive, de l’âge d’or au chaos (Ann., 3, 26-28).

Puis viennent les rois, et les lois. Comme pour la médecine, les lois sont d’abord grossières, puis de plus en plus raffinées. La loi des Douze Tables, a  Ve siècle av. J.-C., est définie comme finis aequi iuris, règle du droit équitable, mais aussi terme ultime, avant la décadence. C’est surtout le siècle qui s’étend des Gracques à Auguste qui fait de la loi un instrument de lutte politique entre les factions et les imperatores, avec les échecs de Sylla, « dictator legibus scribundis et rei publicae constituendae », puis de Pompée, « corrector morum » pendant son consulat unique en 52 av. J.-C. Tacite – terminant sa digression – revient au présent avec Auguste : en 28 av. J.-C., après la législation négative et oppressive de la guerre civile et avec l’abrogation des normes triumvirales, est désormais instaurée une législation positive, moralisatrice. Ce nouveau commencement est d’ailleurs confirmé par un aureus de la même année, sans doute la seule monnaie romaine dans laquelle le prince apparaît dans un contexte juridique : la légende « Leges et iura p(opuli) R(omani) restituit » indique qu’Auguste a rétabli les leges et les iura du peuple romain. Mais l’équilibre entre puissance du prince et normes bien pondérées est de courte durée. Désormais, la société souffre à cause des lois, aux effets pervers. C’est justement ce qui se passe avec la lex Papia Poppaea. Les lois matrimoniales, mais également les lois somptuaires échouent, notamment, selon Tacite, parce que, si Auguste se présente comme le médecin d’une société malade, il ne sut pas susciter par son comportement le désir d’imiter le prince, un désir qui serait plus fort que la crainte des lois.

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