Le 26 février 1450, le condottiere Francesco Sforza entre dans la ville de Milan : la mémoire d’Ambroise va devenir provisoirement infréquentable, tant elle s’était compromise avec le régime républicain. Mais peut-on vraiment manipuler le souvenir ? L’analyse porte sur le De rebus gestis Francisci Sfortiae commentarii de Giovanni Simonetta, portrait en pied d’un virtuose de l’activité politique, éloge du calcul et de la dissimulation. L’occultation prudente du souvenir ambrosien jusqu’en 1466 laisse quelques traces, outre la latence iconographique : les processions civiques sont détournées vers l’église Sant’Ambrogio ad Nemus et capturées dans l’espace palatial ; Ambroise circule sous des noms d’emprunts, le revival chevaleresque imposant le culte de saint Georges. Mais commence de manière plus discrète la reconquête princière du souvenir ambrosien, rendue visible dans le grand cycle de la chapelle Griffi à San Pietro in Gessate. Pourtant, en 1476 débute également la mauvaise saison des assassinats politiques. Le meurtre de Galeazzo Maria Sforza (26 décembre 1476) permet de régénérer rituellement dans le sang du tyran un pacte politique rompu. Se poursuit donc une séquence anti-princière qui s’autorise politiquement du nom d’Ambroise : la brèche n’est pas colmatée. Quant à la rupture princière, elle pose le problème général de l’absolutisation du pouvoir.
11:00 à 12:00
Cours
Comment oublier Ambroise ?
Patrick Boucheron