Résumé
Le cours commence par une évocation de sa « situation » dans le déroulement des enseignements (cours et séminaires) depuis 2016 en revenant sur la valeur euristique de la notion d’expérience. On l’envisage ici dans son rapport à l’agency, selon une dialectique historique pensée par Edward Thompson (« Les hommes agissent, font l’expérience, pensent et agissent à nouveau »). Mais à partir de quel passé ? Entre le passé de référence gréco-romain (dont l’anthropologie historique permet de distinguer ici le politique de la politique) et le « plus actuel passé » des Lumières, on s’interroge sur l’efficace théorique du passé médiéval. Et ce à partir d’une étude de cas : l’analyse par Ernst Kantorowicz des acclamations liturgiques du culte royal, objet apparemment inactuel mais qui retrouve au moment où il écrit son livre (Laudes Regiae. Une étude des acclamations liturgiques et du culte souverain au Moyen Âge, 1946, trad. fr., Paris, 2004) une bruyante actualité politique, obligeant l’historien à s’interroger sur « les dangers inhérents à la profession d’exhumer le passé ». L’analyse que l’on se propose alors, à partir de la relecture de cette enquête érudite, vise la genèse liturgique du gouvernement des modernes. Elle permet aussi de découper un passé disponible dans la période médiévale, très au large : depuis le nouage carolingien dans les années 780 entre royauté davidique et liturgisation du pouvoir séculier jusqu’aux trois fins possibles des louanges royales (avec Richard II en 1377, avec Charles-Quint en 1530, avec Charles de Habsbourg en 1918), qui représentent aussi trois fins possibles pour le Moyen Âge.