Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

En rejouant l’entrée du Christ à Jérusalem, le rituel de la première entrée épiscopale conjugue donc reenactment et adventus – mais on ne doit pas croire pour autant que, lorsqu’il est saisi par le pouvoir politique, ce rituel de l’entrée ne sert qu’à exalter la personne du souverain ; bien au contraire, le cas de Louis XI et de ses entrées escamotées trahit le fait que le rituel peut aussi tester les limites et les contradictions du pouvoir. Mettant à distance l’inévitable téléologie de l’école cérémonialiste, la séance s’interroge sur la possibilité d’une expérimentation rituelle, notamment à partir d’une analyse de la dédition des bourgeois de Calais en 1347. Retrouvant, avec Jean-Marie Moeglin, la tradition de l’amende honorable, et donc les traces de l’humiliation souveraine, derrière les incohérences du discours de Froissart, on suggère donc que ce sont les ratés du rituel qui font les événements politiques. Telles sont les conditions de l’expérimentation rituelle, puisqu’il appartient au rituel de se nier comme tel, ouvrant donc la possibilité même de son renversement.

Sommaire

  • « Cela devient un rituel » : rythmes, ritournelles et perplexités
  • 1347, l’affaire des bourgeois de Calais (Jean-Marie Moeglin, Les bourgeois de Calais. Essai sur un mythe historique, Paris, 2002)
  • Déplacements et anachronismes : « On croit lire une page de l’histoire des plus beaux temps de la République romaine, placée par aventure et comme par méprise au milieu de l’histoire de la chevalerie » (Chateaubriand, Études historiques, 1831)
  • Poser « sur des bases neuves la vieille question » : que s’est-il réellement passé à Calais le 4 août 1347 ?
  • Froissart et les autres : un cas d’inversion de relief mémoriel des actes de production textuelle de l’événement
  • Derrière l’événement, la tradition de l’amende honorable et de l’humiliation souveraine
  • « La répétition qui tient à l’essence du phénomène [rituel] s’accommode fort bien d’un mouvement incessant d’émergence, de résurgence et, surtout, de métamorphose » (Daniel Fabre, « Le rite et ses raisons », Terrain, 1987)
  • Deditio, rituel de réconciliation et harmiscara (Jean-Marie Moeglin, (« Harmiscara / Harmschar / Hachée. Le dossier des rituels d’humiliation et de soumission au Moyen Âge », Archivum latinitatis medii Aevi, Bulletin Du Cange, 64, 1994)
  • La colère et la grâce (Claude Gauvard, Condamner à mort au Moyen Âge, Paris, 2018)
  • Répétition des ordonnances de réforme monétaire et surgissement de la majesté (Sylvain Piron, « Monnaie et majesté royale dans la France du XIVe siècle », Annales HSS, mars-avril 1996)
  • La formule de l’émerveillement : exercices d’orfèvreries textuelles (Sébastien Barret et Benoît Grévin, « Regalis excellentia »Les préambules des actes des rois de France au XIVsiècle (1300-1380), Paris, 2014)
  • Rite politique et liturgie chrétienne : loca, tempora, personae, res
  • Un rituel fantôme ? Le démembrement de la chaîne rituelle et les restes liturgiques
  • Quand les ratés du rituel font les événements politiques (Crémone, 1311)
  • Fin du long Moyen Âge ? Dans les années 1760, l’apothéose théâtrale des Bourgeois de Calais et le début de l’ère du soupçon
  • Bretigny et Voltaire, ou l’érudition et l’histoire philosophique aux origines du scepticisme des Modernes
  • Au total, l’affaire de Calais « est un rituel paradoxal dans la mesure où il fait partie du rituel lui-même de se nier comme tel » (Jean-Marie Moeglin)
  • Reenactment et adventus : le rituel de la première entrée épiscopale rejoue l’entrée du Christ à Jérusalem
  • Transformation rituelle et texte cérémonialiste : une critique en téléologie
  • Le rituel ne vise pas à exalter la personne du souverain mais à tester les limites et les contradictions de son pouvoir
  • Louis XI, le roi qui ne voulait pas exercer son métier de roi
  • « Mais lui, après avoir franchi la porte de la ville évitait aussitôt par des voies détournées la place publique et se hâtait le plus qu’il pouvait vers la demeure qui lui avait été préparée » (Thomas Basin, Histoire de Charles VII et de Louis XI)