Les plus anciens « incunables » coptes comptent ensuite un glossaire fondé sur le texte grec des livres des prophètes mineurs Osée et Amos (le papyrus du British Museum EA 10825), un ensemble de gloses à une autre édition grecque des prophètes mineurs (Freer Manuscript V), ainsi que des traductions coptes, non seulement de textes bibliques (la tablette de la Bodléienne Greek Inscr. 3019 et le Papyrus Hambourg bilingue 1), mais aussi d’une production liturgique locale (le Papyrus Kiseleff 3 qui pourrait être de la fin du IIIe siècle et qui, contrairement à ce que pensent ses éditeurs, n’a rien de nécessairement monastique).
La tablette est des plus instructives quant à l’ambiance culturelle dont elle est issue : elle fait partie d’un codex de sept tablettes comprenant, outre une copie du psaume 46, 3-10, des exercices en grec (grammaticaux, littéraires et mathématiques). L’examen de l’écriture et des fautes commises par le scripteur donne à penser – malgré les analyses de Lefort – que celui-ci appartenait à un milieu égyptien profondément hellénisé mais tentant d’élaborer un enseignement qui fasse aussi place au copte à une époque où c’est le grec qui a le monopole. Il ne s’agit pas de remplacer l’enseignement grec par un enseignement copte mais d’intégrer l’un dans le cadre de l’autre, lequel, auréolé du prestige de l’ancienneté, procédant d’une pédagogie qui a fait ses preuves et correspondant aux exigences d’une société fondée sur la pratique écrite grecque, ne pouvait que rester prépondérant pendant encore longtemps. Cette tablette est donc une parfaite illustration non seulement de la coexistence, dans un milieu scolaire, du grec et du copte, mais surtout de la nécessité qu’avait le copte de cohabiter avec le grec ; il est révélateur d’un multilinguisme et d’un multiculturalisme obligés.