Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Dans son Liber gestorum in Lombardia,le notaire et chroniqueur Pietro Azario intègre dans son récit sur Bernabò Visconti une anecdote tirée de la novellistica. Doit-on ici parler de contamination de l’histoire par la fiction ? On se propose ici de la traiter comme d’une inflammation : au feu de la fiction, l’histoire devient disponible à une compréhension en matière d’anthropologie politique – notamment en ce qui concerne l’exercice de la justice et l’usage de l’arbitrium. On tente de le montrer à partir de l’analyse codicologique d’un manuscrit composite du XVe siècle, qui compile des nouvelles ayant Bernabò Visconti comme protagoniste, mais aussi la Storia di Firenze de Goro Dati. Voici également ce que cherchait Machiavel dans sa Vie de Castruccio Castracani, pour boucler l’entreprise d’archéologie textuelle qui s’achève avec cette quatrième leçon consacrée à l’étrange destin littéraire du tyran milanais : c’est lorsque le récit historique s’ouvre à la puissance fictionnelle du cas Bernabò Visconti, à sa capacité de novellisation du réel, qu’il laisse passer non pas la vérité du fait, mais celle du moment historique.

Sommaire

  • Pietro Azario, Liber Gestorum in Lombardia : quand une nouvelle s’invite dans le récit d’un chroniqueur
  • Bernabò Visconti et le paysan de Melegnano, ou l’impassibilité péricléenne
  • Destin littéraire de la « pseudo-nouvelle » : de Pietro Azario au Lamento
  • Avant la peste de 1361 : appétit d’histoire et tyrannie de la mort
  • Variance littéraire (Bernard Cerquiglini) et Feu des manuscrits (Alain Boureau)
  • Histoire d’une curiosité : Pietro Ginori Conti, entrepreneur, sénateur et collectionneur (Novelle inedite intorno a Bernabò Visconti, Milan, 1940)
  • Trois mains, deux ensembles textuels : description codicologique d’un manuscrit composite
  • De la Storia di Firenze de Goro Dati aux six chapitres d’acquisition de la ville de Pise par Florence en 1406
  • Le pont, l’âne et le paysan trop galant : la première nouvelle du recueil anonyme, les Ghiribizzi de Rofia et les Facéties de Domenichi
  • La neuvième nouvelle ou la beffa d’Ezzelino da Romano réattribuée à Bernabò Visconti
  • Faux indigents et vrais trésors de l’Église : retour sur un hymne ambrosien (Apostolorum supparem)
  • Sur une articulation codicologique entre chronique et nouvelle : Perchè quasi nel prencipio du questo libro si tratta alchuna chosa di messer Bernabò de’ suoi notabili, qui apresso ne se dirà alchuni che non sono schritti là, e però ne faremo menzione qui apreso chome nella seghuente faccia 63 seghuirà. In questo a c. 6
  • Goro Dati et la florentina libertas, « contra et adversus Ducem Mediolani » (Luciano Piffanelli)
  • « Car telle était sa miséricorde qu’il punissait plus sévèrement, pour une même faute, le riche et le puissant que le pauvre »
  • « Superbe, furieux, cruel et luxurieux » (Paolo Morigia, 1595) : portrait des Visconti en débauchés, de Matteo Villani à Bernardino Corio
  • Bernabò Visconti et Regina della Scala, couple politique
  • Le fantôme de Bernarda Visconti, spectre de la femme adultère (Élisabeth Crouzet-Pavan et Jean-Claude Maire Vigueur, Décapitées. Trois femmes dans l’Italie de la Renaissance, 2018)
  • Jacob Burckhardt et l’État considéré comme une œuvre d’art, « comme une création calculée, voulue, comme une machine savante »
  • « Chose singulière ! L’époque brillante de l’Italie finit au moment où les petits tyrans sanguinaires furent remplacés par des monarques modérés » (Stendhal, Rome, Naples et Florence)
  • « L’un avait nom Galiache/L’autre Bernabò on nommait/que l’on craignait plus qu’on aimait » (Christine de Pizan, Livre de la mutation de fortune)
  • Bernabò Visconti est un garçon formidable (metus, terror, formido : lexique de la peur)
  • Le gouvernement de la grâce et « l’aptitude à raconter » (Natalie Zemon Davis, Pour sauver sa vie. Les récits de pardon au XVIe siècle, 1988)
  • Novellistica et prédicateurs (Carlo Delcorno et Lucia Battaglia Ricci)
  • « Et j’avoue que ces "nouvelles", surgissant soudain à travers deux siècles et demi de silence, ont secoué en moi plus de fibres que ce qu’on appelle d’ordinaire la littérature… » (Michel Foucault, La Vie des hommes infâmes, 1977)