Si le monument funéraire de Bernabò Visconti apparaît bien comme un tombeau sous forme de provocation, l’histoire qui y mène est celle d’une dispute des pouvoirs, à partir de la dissémination symbolique de signes manipulés par l’autorité pontificale. La mue seigneuriale de la vipère des Visconti pose donc la grave et ancienne question des rapports entre violence conservatrice et violence fondatrice de droit. Mais si on peut ramener la fièvre statuaire à ses origines gréco-romaines, celles-ci transmettent aussi aux pratiques médiévales de la dérision les épigrammes latins des vitupérateurs. La statue parle. On analyse ici le Lamento di Bernabò Visconti en rappelant l’importance du développement de la poésie encomiastique dans l’entourage des Visconti, mais aussi de la tradition des éloges funèbres. D’où le paradoxe : pourquoi Franco Sachetti, qui compose des féroces chansons politiques contre le seigneur de Milan, écrit-il de lui dans ses Trecentonovelle : « Bien qu’il fut cruel, il y avait dans ses cruautés une grande part de justice » ?
11:00 à 12:00
Cours
Le cas Bernabò
2. Rimes, ruses et dissémination
2. Rimes, ruses et dissémination
Patrick Boucheron
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