Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Résumé

Comment, en 1314, le scandale des brus du roi devient-il l’affaire de la Tour de Nesle ? En s’intéressant aux réécritures légendaires d’un épisode qu’on pourrait juger mineur, on cherche à interroger les rapports entre ce genre décrié qu’est la « petite histoire » et la narration historique de plus grande ampleur. Car ce qui est en jeu dans la dernière année du règne de Philippe le Bel est bien la question, éminemment politique, de la violence et du consentement : accuser l’infidélité des reines, c’est questionner la fidélité de l’aristocratie. Mais il n’est pas dit que le sexe soit toujours le secret du pouvoir : de l’anecdote de Procope de Césarée à la « bagatelle » du cardinal de Retz, la leçon des fables – et notamment celle de Boccace, sur laquelle on s’arrête à nouveau – permet de mettre à l’épreuve la question de la jouissance et de la sublimation.

Sommaire

  • Un mot pour un autre : retour sur le sexe des institutions
  • « Nation France » et « mère patrie » : sur une certaine indistinction de genre de la grammaire politique
  • Trois fils vont régner, mais pas la fille : les enfants de Philippe le Bel
  • 1314, le scandale des brus du roi : « Trois princesses s’ennuyaient, que deux chevaliers “jolis et gais” vinrent distraire » (Jean Favier, Philippe le Bel, Paris, 1978)
  • Le châtiment des chevaliers normands, les frères Gauthier et Philippe d’Aunay, « escorchiez et les viz coupez »
  • La révélation de l’adultère : questions de chronologie, problèmes d’anthropologie historique (Elizabeth A. R. Brown, « Philip the Fair of France and His Family’s Disgrace: The Adultery Scandal of 1314 Revealed, Recounted, Reimagined, and Redated », Mediaevistik, 2019)
  • Dans les Grandes Chroniques de France, le soulèvement des ligues nobiliaires passé sous silence et le souvenir écran du scandale des brus du roi (Tracy Adams, « Between History and Fiction: Revisiting the Affaire de la Tour de Nesle », Viator, 2012)
  • 30 mai 1315, mort de Marguerite de Bourgogne et exécution d’Enguerran de Marigny : « ici finit l’histoire du roi Philippe le Bel »
  • « Certaine science, et autorité, et pleine puissance » : tautologie de la majesté et monopole de la violence légitime (Jacques Krynen, Philippe le Bel. La puissance et la grandeur, Paris, 2022)
  • L’infidélité des reines et la confusio regni (Geneviève Bührer-Thierry, « La reine adultère », Cahiers de civilisation médiévale, 1992)
  • « Ce choc, ce heurt de la conscience et du corps » : scandalum et sphère publique (Arnaud Fossier, « Propter vitandum scandalum” : histoire d’une catégorie juridique (XIIe-XVe siècle) », Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, 2009)
  • Accuser l’accusation : du scandale des brus du roi à l’affaire de la Tour de Nesle (Luc Boltanski, Élisabeth Claverie, Nicolas Offenstadt et Stéphane Van Damme dir., Affaires, Scandales et Grandes Causes, Paris, 2007)
  • « Semblablement, où est la royne/Qui commanda que Buridan/Fust gecté en ung sac en Saine ? » : François Villon, Hans Jencz et le Judicum Burridano
  • Les cent amants de Jeanne de Navarre (Franck Collard et Isabelle Heullant-Donat, « Deux autres Jeanne : figures de reines défigurées aux XIVe et XVe siècles », dans Anne-Hélène Allirot, Murielle Gaude-Ferragu, Gilles Lecuppre et al. dir., Une histoire pour un royaume, XIIe-XVe siècle, Paris, 2010)
  • Jean Buridan, ou le sexe du savoir-pouvoir
  • La Tour de Nesle comme harem inversé : imaginaires politiques et géographie universitaire (La Tour de Nesle : de pierre, d’encre et de fiction, catalogue de l’exposition de la bibliothèque Mazarine, Paris, 2014)
  • Amplifications et relais fictionnels, d’Alexandre Dumas à Maurice Druon (Stéphane Le Couëdic, « Mais où sont les drames d’antan ? La Tour de Nesle dans le roman et le drame populaire », dans Florent Montaclair, dir., Roman-feuilleton et théâtre : L’adaptation du roman-feuilleton au théâtre, Besançon, 1998)
  • Au paroxysme de la violence gothique : les « châteaux de la subversion » (Annie Le Brun, Les Châteaux de la subversion, Paris, 1982)
  • Sade, le donjon de Vincennes et La philosophie dans le boudoir : une « autocritique des Lumières » (Antoine Lilti, L’Héritage des Lumières. Ambivalences de la modernité, Paris, 2019)
  • La petite et la grande histoire (Écrire l’histoire, 2017 : « La petite histoire »)
  • « Les faits n’ont pas de taille absolue » (Paul Veyne, Comment on écrit l’histoire, Paris, 1975)
  • De Procope au cardinal de Retz : anecdotes, dévoilement, secrets
  • L’infidélité du roi, une « transgression raisonnée » (Flavie Leroux, Les Maîtresses du roi, de Henri IV à Louis XIV, Ceyzérieu, 2020)
  • La sexualité du couple princier, une affaire publique ? (Pascale Mormiche, Donner vie au royaume. Grossesses et maternités à la cour de France (XVIIe-XVIIIe siècles), Paris, 2022)
  • Idéal galant et conversation entre les sexes (Alain Viala, La Galanterie. Une mythologie française, Paris, 2019)
  • La sexualisation de l’échange galant (Jennifer Tamas, Peut-on encore être galant ?, Paris, 2024)
  • « Au faible, il ne sert à rien d’accuser la force : le pouvoir des faibles et le pouvoir des fables (Louis Marin, Le Récit est un piège, Paris, 1978)
  • Pesci su per la mensa guizzavano : Charles d’Anjou au jardin du désir frémissant (Boccace, Decameron, X, 6)
  • « Le roi se laissa prendre dans les rets de l’amour » (Jean-Claude Mühlethaler, « La nouvelle et la “petite histoire” : de Boccace à Marguerite de Navarre », Écrire l’histoire, 2017)
  • La sublimation, comme travail de civilisation et de subjectivation : « Là où était du ça, doit advenir du moi » (Sigmund Freud, Nouvelles Conférences d’introduction à la psychanalyse, Paris, 1933)
  • Le pouvoir comme zone érogène et le gouvernement priapique
  • Jouir, verbe intransitif
  • Ce qu’a vu Tirésias.