Parfois, les exercices scolaires, avec leurs paradoxes et leurs exagérations, peuvent aider à saisir des concepts complexes. C'est ce qui se produit avec les déclamations latines, courts discours nés dans les écoles de rhétorique. Elles représentent des voies pour s'approcher de la mentalité et de la culture romaines, et ont pour cela attiré toujours plus l'attention des chercheurs ces dernières années. La Déclamation mineure 261 (Declamatio minor) – œuvre de Quintilien ou de l'un de ses émules, écrite probablement à la fin du Ier ou au IIe siècle apr. J.-C. – discute une proposition de loi imaginaire, qui vise à redistribuer tous les biens entre les citoyens, pour rendre égaux les patrimoines (et empêcher ainsi toute tentative de s'emparer du pouvoir politique grâce à sa richesse). La déclamation nous accompagne dans une critique serrée de ce projet, jusqu’au point central : rendre égaux les patrimoines violerait la raison d’être du droit. Le droit naît précisément de la volonté de garantir à chacun la conservation de ses biens, ce qui est la fonction de l'équité. L'égalité est en revanche mise à nu comme un facteur contradictoire avec le droit. Proposer d'égaliser les patrimoines sert donc de contre-modèle pour faire émerger – aux yeux des Romains, mais aussi d’une longue tradition moderne, juridique, philosophique, historiographique – le lien archétypique entre droit et protection de la propriété privée.
14:30 à 15:30
Cours
L'inégalité à l'origine du droit. Du « communisme » à Rome ?
Dario Mantovani
14:30 à 15:30