Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Après le déchiffrement de la version en vieux-perse des inscriptions trilingues des rois achéménides, les savants firent surtout porter leurs efforts sur la version qu'on décrivait alors comme « assyrienne », en raison de sa parenté avec les textes découverts dans le nord de l'Irak actuel, à Khorsabad, Ninive et Nimrud. Oppert écrivait alors : « L'assyrien, la langue sémitique de Ninive et de Babylone », tandis que nous distinguons aujourd'hui entre assyrien et babylonien, deux variantes d'une langue sémitique que les Mésopotamiens eux-mêmes appelaient akkadien.

Le déchiffrement fit des progrès décisifs entre 1851 et 1857. Il fallut d'abord se défaire de l'idée que le simple précède le complexe : on avait cru pendant longtemps que l'écriture dite persépolitaine était la plus ancienne des trois écritures des inscriptions achéménides, alors que c'est exactement le contraire. Il faut en outre souligner que, dans le déchiffrement du cunéiforme assyrien, la trilingue de Behistun n'a pas joué un rôle ausi crucial que la plupart des récits l'indiquent, en faisant un parallèle exagéré avec la pierre de Rosette : les inscriptions de Khorsabad d'abord, puis les tablettes de la bibliothèque d'Assurbanipal de Ninive jouèrent un rôle au moins aussi important. Il fut assez vite reconnu par les principaux acteurs du déchiffrement que l'assyrien appartenait à la famille des langues sémitiques : c'est d'ailleurs parce que Rawlinson connaissait bien le perse, mais beaucoup moins bien l'hébreu et l'arabe, qu'il ne joua pas dans le déchiffrement de l'assyrien un rôle aussi important que dans celui des textes rédigés en vieux-perse. L'écriture cunéiforme qui notait l'assyrien se révéla bien plus compliquée que l'alphabet persépolitain en raison de plusieurs caractéristiques : la présence de déterminatifs, l'homophonie et la polyphonie. On désigne par homophonie le fait que des signes différents notent un même son. La polyphonie, au contraire, permet à un même signe d'avoir, selon les contextes, plusieurs lectures différentes. Ce fut Hincks qui découvrit ce principe dès 1846 : non seulement un même signe pouvait correspondre à différentes syllabes, mais il pouvait même noter un mot entier (constituant alors ce qu'on appelle un logogramme). De retour de Babylone, Oppert travailla en 1855 sur les tablettes de la bibliothèque du roi Assurbanipal rapportées de Ninive à Londres ; il fut le premier à tirer parti des syllabaires, mais aussi des textes grammaticaux et rendit compte de ses progrès dans un rapport publié en mai 1856. En février 1857, Oppert édita l'inscription de Nabuchodonosor II relative au temple de Nabu de Borsippa : c'était la première fois qu'un texte babylonien entier était ainsi transcrit et traduit sans l'existence d'une autre version, comme le vieux-perse.