Cette leçon a illustré la fusion scientifique qui a eu lieu entre la communauté des polyméristes et celle des chercheurs développant les procédés sol-gel basés sur une chimie minérale douce. Dans un contexte historique, les deux communautés ont d’abord développé séparément sur un mode non collaboratif des matériaux hybrides mariant les polymères organiques et les oxo-polycondensats métalliques résultant de réactions de condensation de précurseurs minéraux, principalement des alcoxydes des organo-alcoxydes métalliques. La communauté des polymères, à la recherche de nouvelles charges minérales pour améliorer les propriétés mécaniques des composites, utilisa très vite la chimie douce qui permettait de disperser in situ de la silice nanométrique et de mieux contrôler les interfaces organo-minérales (interface entre la charge renforçante et le polymère), via des réseaux de liaisons hydrogène ou via des liens covalents en utilisant des macromonomères fonctionnalisés par des groupements alcoxysilane. Astucieusement, les polyméristes développèrent des réseaux hybrides interpénétrés, donnant lieu a des pièces massives ou des films sans retrait, en faisant polymériser le solvant dans lequel à lieu la réaction de polycondensation minérale. La communauté sol-gel de son côté, développa l’utilisation de nanocharges (clusters oxo- métalliques, nanoparticules) fonctionnalisées par des monomères afin de synthétiser des nanocomposites hybrides en partant d’un cœur minéral (une charge) parfaitement défini. Elle a su également mettre en œuvre les processus de séparation de phase bien connus chez les polyméristes, afin de synthétiser des matériaux minéraux à porosité bimodale pour élaborer des supports chromatographiques performants. Mais ce n’est qu’au milieu des années 90, que les deux communautés ont commencé à collaborer plus intensément. Ces collaborations ont donné de nombreuses et fructueuses découvertes et ont permis l’élaboration de matériaux fonctionnels, complexes, ayant des propriétés optiques, mécaniques, électriques très intéressantes.
Les cristaux photoniques obtenus par minéralisation d’empilements ordonnés de sphères de latex, à l’inverse des opales électro-actives obtenues par imprégnation d’empilement ordonnées de sphères de silice par des polymères conducteurs, sont des exemples qui mettent en valeur la richesse des collaborations entre ces deux communautés. Dans la seconde partie de la leçon, nous avons discuté de développements plus récents. Ceux ci concernent :
- l’utilisation de polymères organiques à blocs amphiphiles pour générer des matériaux composites denses ou poreux à structures régulières mais complexes ;
- le couplage entre des nanoparticules d’or et des polymères afin de construire de manière parfaitement contrôlée des analogues hybrides de copolymères à blocs constitués de nanotiges métalliques reliées par des polymères. Dans ces systèmes la réponse optique de l’or peut être modulée en fonction de la distance inter-tige et donc de la structure de l’assemblage. Cette dernière peut être ajustée en modulant l’affinité entre le polymère et le solvant pour former des structures en longues chaînes, anneaux, fagots, sphères... ;
- l’élaboration de membranes permsélectives avec effet barrière ;
- la synthèse de matériaux mésoporeux hybrides dont la porosité est obstruée par une « porte réversible » constituée de polymères photo- et thermo-sensibles permettant la délivrance contrôlée optiquement d’un principe actif ;
- l’élaboration par extrusion électro-assistée de membranes hybrides très performantes pour les piles à combustibles présentant de nouvelles architectures, analogues à celle d’un béton armé.
La dernière partie de cette leçon nous a permis de présenter rapidement des recherches qui démontrent une nouvelle fois que la chimie douce et la chimie des polymères peuvent être mariées efficacement. En particulier, l’élaboration de matériaux hybrides à structures hiérarchiques et l’étude des processus de minéralisation en présence de biopolymères sont des sujets d’actualité, très riches, qui seront développés plus précisément au cours d’enseignements futurs.