Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la communauté internationale, confrontée au problème posé par la masse des réfugiés fuyant les guerres civiles, les dictatures et les persécutions, tente d’y apporter des solutions. Ces solutions, en partie inspirées par des préoccupations humanitaires qui incitent à protéger les réfugiés, restent très largement tributaires des intérêts étatiques qui poussent au contraire à tenir à distance ces indésirables.
Un siècle plus tard, la donne n’a pas fondamentalement changé : malgré l’adoption de la Convention de Genève, en 1951, en dépit de toutes les proclamations solennelles sur le caractère « sacré » du droit d’asile, celui-ci apparaît de plus en plus comme une coquille vide. Tandis que le nombre de réfugiés dans le monde s’est accru dans des proportions considérables – vingt-quatre millions, en 2016, soixante-cinq millions si on inclut les personnes déplacées dans leur propre pays –, les États occidentaux, uniquement préoccupés par la « maîtrise des flux migratoires », tentent par tous les moyens d’empêcher l’accès de ces réfugiés à leur territoire où ils pourraient trouver protection. Par une série d’artifices juridiques, ils s’efforcent de contourner l’obligation de non-refoulement et les autres obligations contraignantes des conventions internationales jusqu’à les vider de leur substance – quand ils ne les violent pas ouvertement et frontalement.