Construit et élaboré à la suite des conquêtes d’Alexandre (334-323 av. J.-C.), le monde hellénistique a régulièrement été analysé au miroir des colonisations européennes modernes et contemporaines, à travers l’assimilation postulée avec les établissements grecs fondés par le conquérant et par ses successeurs entre Méditerranée et Asie centrale. La question des rapports entre populations locales et colons grecs a été fréquemment introduite dans les débats sur « la question indigène ». Les migrations européennes ont-elles conduit à une européanisation des populations conquises, ou, au contraire, les influences orientales n’ont-elles pas eu pour conséquence une « orientalisation » des colons européens, voire de la Grèce elle-même, par voie de « contamination », voire de « submersion indigène » ? Telle est la question que, depuis l’époque romaine, des générations d’hommes politiques et d’historiens ont posée au monde hellénistique, espérant y trouver des réponses pour les présents successifs de l’Europe coloniale.