Amphithéâtre Maurice Halbwachs, Site Marcelin Berthelot
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La présence environnementale d’antibiotiques et de gènes assurant contre eux une résistance est une expression darwinienne de la sélection naturelle dans le monde microbien. Le rôle majeur de la production d’antibiotiques par un microorganisme dans les environnements naturels est de permettre la colonisation d’une niche ou la survie dans un univers polymicrobien complexe. La résistance peut ainsi être vue comme une réponse sélective à cette production par les bactéries productrices elles-mêmes ou leurs bactéries cibles. La crise actuelle de la multirésistance aux antibiotiques peut donc être vue comme une exacerbation d’un phénomène naturel causée par l’introduction massive d’antibiotiques « exogènes » dans l’environnement à partir du milieu du xxe siècle. Cette introduction n’est pas uniquement médicale : ses excès s’étendent au domaine vétérinaire, à l’agriculture et à l’élevage. Faute de mesures drastiques, la flambée planétaire actuelle de la multirésistance pourrait nous priver, après un siècle miraculeux, d’un des outils le plus efficaces de la médecine. La flambée de l’antibiorésistance bénéficie de la richesse du « résistome », c’est-à-dire du répertoire global, humain, animal, environnemental, de gènes potentiels de résistance aux antibiotiques (20 000 ?), de l’efficacité de dissémination des vecteurs de ces gènes de résistance (plasmides, transposons, intégrons), et enfin de l’amplification du phénomène par l’augmentation des échanges nationaux et internationaux. Parmi les mécanismes les plus préoccupants de cette épidémie de résistance figurent les carbapénémases, enzymes capables d’hydrolyser les bêta-lactamines de dernière génération à très large spectre et les pompes à efflux capables d’empêcher efficacement l’accès des antibiotiques à leurs cibles. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment saisi l’importance du risque, mais la réversion du processus sera longue et complexe, surtout au regard de la pauvreté de l’offre en matière de nouveaux antibiotiques.