Si « l’histoire est cet effet de songe laborieux par lequel nous nous soulevons de la nuit au jour, de la mort à la vie » (Jules Michelet, « Avenir ? Avenir ? », 1842), alors une réflexion historique sur la puissance fictionnelle de la tyrannie peut nous permettre d’envisager les tyrannies d’aujourd’hui. L’enquête reprend donc devant le tyran attirant peint par Ambrogio Lorenzetti dans le palazzo pubblico de Sienne en 1338 : porte-t-il un masque ou vient-il d’être démasqué ? La question d’un pouvoir qui se caricature lui-même pour désarmer par avance toute possibilité de critique subversive pose la question des rapports entre pastiche et postiche, question sur laquelle on reviendra à la toute fin du cours. Mais, pour l’heure, cette première séance introductive se poursuit par un effort de définition, prenant notamment en compte les travaux de la critique littéraire sur fictio et figura, entre théories artéfactuelles et risques du panfictionnalisme. On propose une critique déflationniste de la fiction comme mise en tension d’une expérience de pensée, entre le pôle mimétique et le pôle axiomatique. Dès lors, la fiction politique peut être définie comme une forme narrative de théorie de la politique ou, avec Michel Foucault, une épreuve de pensée qui, depuis le passé, produit des « effets de vérité » sur l’aujourd’hui et éclaire la politique à venir.
11:00 à 12:00