Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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On est parti du postulat foucaldien que la fiction politique faisait l’expérience d’une politique qui n’existait pas encore à partir d’une vérité historique. Mais qu’est-ce, dans ce cas, qui est préfiguré ? Contre la croyance littéraire à la prédestination des œuvres, on peut supposer que tout auteur invente ses devanciers et établit des généalogies à rebours. Dans l’ordre politique, d’Alexandre le Grand à Napoléon, on peut agir pour que se réalise ce qui était écrit d’avance : le recours à la préfiguration est alors censé, avance Blumenberg, « garantir à l’action la certitude de la décision ». Cette hypothèse est alors testée à partir de quelques figures souveraines du XIIIe siècle (de Saint Louis à Baybars), en s’interrogeant sur la capacité des puissants à devenir, de leur vivant même, des personnages de roman. Une telle réflexion débouche sur une analyse du dérèglement paroxystique du pouvoir à partir du cas de Néron. Car c’est aussi au miroir de cet imaginaire néronien de la cruauté grotesque que la pensée politique médiévale a pensé la tyrannie.

Sommaire

  • « Que de fois une robe de femme lui avait jeté au passage, avec le souffle évaporé d’une essence, tout un rappel d’événements effacés » : Maupassant après et d’après Proust
  • Fictionnaliser la fiction (Pierre Bayard, Le plagiat par anticipation, Paris, 2009)
  • L’invention des devanciers comme production entre l’auteur et son lecteur
  • Des généalogies à rebours, contre la croyance littéraire à la prédestination
  • « Le recours à la préfiguration est censé garantir à l’action la certitude de la décision » (Hans Blumenberg, Préfigurations)
  • Agir pour que se réalise ce qui était écrit d’avance ­: Alexandre le Grand, Frédéric II, Napoléon
  • Préfiguration et travail du mythe
  • Comment devenir, de son vivant, un personnage de roman ? Les trois vies du sultan Baybars (Jacqueline Sublet)
  • Le personnage du ayyar dans le Roman de Baybars : alerter le souverain, supporter un discours de satire sociale
  • Baybars et ses doubles mythologiques (Anne-Marie Eddé)
  • En France, en Castille et en Éthiopie, les royautés salomoniennes
  • Quand la fiction se fait anticipatrice (Marc Bloch, « La vie d’outre-tombe du roi Salomon », 1925)
  • Saint Louis est « notre Josias » (Jacques Le Goff) : la ressemblance historique comme fondement d’un récit politique
  • Le roi de Hongrie et la société hunnique idéale (Edina Bozoky) : identification et préfiguration
  • En quête du « rouage du grotesque dans la mécanique du pouvoir » (Michel Foucault)
  • Historiopoétique d’un dérèglement paroxystique du pouvoir (Donatien Grau, Néron en Occident, Paris, 2015)
  • Renaissance nérorienne, littérature romanesque et « secret de l’empire » (Tacite)
  • Comment lire le prologue de La Pharsale ? Les ambiguïtés de l’éloge ironique
  • Qualis artifex pereo : une théâtralisation redoublée
  • Les faiz Neron le cruel homme au XIVsiècle : un syncrétisme de la détestation
  • Penser la tyrannie médiévale à partir de l’imaginaire néronien de la cruauté grotesque
  • « Ô mon cœur, ne perds pas ta nature, ne laisse jamais/L’âme de Néron entrer dans ton cœur ferme./Que je sois cruel, mais pas dénaturé » (Shakespeare, Hamlet, acte III, scène II)
  • L’Encomium Neronis de Jérôme Cardan comme « traité du soupçon » (Alexander Roose)
  • La rationalité propre à l’exercice du pouvoir néronien : Sade, Histoire de Juliette : « Comme Néron quand il brûla Rome, je veux être, une harpe à la main, sur un balcon d’où je découvrirai les flammes qui dévasteront ma patrie »