Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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À Rome, mais pas seulement, les intellectuels furent prompts à légitimer la tyrannie. C’est à interroger cette étrange fascination pour la puissance fictionnelle du pouvoir autoritaire qu’est consacrée cette dernière séance du cours. Elle nous remet donc face au visage du tyran. En mettant en regard l’Ecerinis d’Albertino Mussato et la lettre dédicatoire de Dante à Cangrande della Scala, on tente de mettre à l’épreuve cette ambivalence de la fiction politique. Celle-ci s’exprime aussi dans les renversements, déplacements et irradiations parodiques du théâtre médiéval, de la réécriture renardienne de La mort le roi Artu ou du roman à clefs qu’est le Roman de Fauvel. Mais que penser de l’efficacité politique réelle d’une telle inversion carnavalesque ? On achève ces réflexions comme on les avait amorcées, face à l’impossibilité de caricaturer le dictateur – une impossibilité mise en scène par Charlie Chaplin, analysée par André Bazin dans son grand article de 1945 « Sur Le Dictateur : pastiche et postiche ou le néant pour une moustache », et ne pouvant pas ne pas nous faire penser aujourd’hui à l’anachronisme et au prophétisme d’un rire sans comique.

Sommaire

  • Quand les intellectuels croient à la magie (Jean-Claude Milner, Harry Potter à l’école des sciences morales et politiques, Paris, 2014)
  • Machiavélisme de Game of Thrones : « Tolkien peut dire qu’Aragorn devint roi et régna pour une centaine d’années, et qu’il fut sage et bon. Mais il ne pose pas la question : quelle fut la politique fiscale d’Aragorn ? » (George Martin, cité dans Mathieu Potte-Bonneville, Game of Thrones. Série noire, Paris, 2015)
  • « Comment les philosophes ont légitimé la tyrannie » (Pierre Vesperini)
  • Le discours d’escorte du régime impérial stabilisé sous les Flaviens et les Antonins : le prince, loi vivante et bon berger
  • « Vous ne savez pas quel immense monstre est le pouvoir » : Tibère et l’altération de la santé mentale de celui qui exerce le pouvoir
  • Nous revoici donc face au visage du tyran — face à celui qui nous souriait, du haut de son piédestal
  • Dante à Cangrande della Scala : « Mais nous, à qui il est donné de connaître ce qu’il y a de mieux en nous, ne devons pas suivre les traces des troupeaux, mais nous sommes bien plutôt tenus de corriger leurs erreurs »
  • Dante, Marsile de Padoue et Albertino Mussato après la mort de l’empereur Henri VII (1313)
  • Renaissance du genre tragique : l’Ecerinis : « Parle mère : tout ce qui est grandiose et sauvage réjouit mon oreille »
  • Le ventre fécond et la bête immonde, entendre aujourd’hui le chœur tragique, chant de liberté qui ne peut s’entonner que lorsqu’on redoute de la perdre
  • Trahison et lucidité chez Dante : « Nous naquîmes elle et moi de la même racine »
  • Parodie, satire et politique-fiction : la réécriture renardienne de La mort le roi Artu (branche XVI, « Renart empereur », d’après Roger Bellon)
  • Le « barat » et l’écriture parodique en série : la destruction des mythes courtois
  • La parodie théâtrale comme espace de performativité
  • Renversements, déplacements et irradiations parodiques dans le Roman de Fauvel (d’après Jean-Claude Mühlethaler)
  • « À cause de Fauvel, que je vois étriller avec douceur, sans le blesser, j’ai sombré dans la mélancolie, car c’est une bête fort choyée. On le voit souvent représenté en peinture, mais beaucoup ne savent pas s’il faut y voir moquerie, sagesse ou folie » (Gervais du Bus, prologue)
  • L’image et l’impossibilité du retournement carnavalesque : dévoilement et actualisation
  • Er ist wieder da : « la première, quotidienne, l’inexorable obligation de Hitler, c’était de conserver, pour le réveil, sa ressemblance physique » (Jean Genet, Le captif amoureux)
  • André Bazin et le « cambriolage ontologique » de la moustache de Charlie Chaplin (« Sur Le Dictateur : pastiche et postiche ou le néant pour une moustache », Esprit, 1945)
  • « Toute ressemblance entre le dictateur Hynkel et le barbier juif est purement fortuite » : un raté de la fiction
  • « Une vraie guerre d’anéantissement où l’existence d’un protagoniste n’est possible qu’au prix de la disparition d’un autre » (Jean Narboni, Pourquoi les coiffeurs ? Notes actuelles sur Le Dictateur, Paris, 2010)
  • L’anachronisme et le prophétisme d’un rire sans comique
  • « On dirait que les gens sont affublés d’une sorte de répugnance physique contre la vérité » (Klauss Mann, Contre la barbarie)

Événements