Le rôle de l’Église et du monachisme dans l’officialisation du copte
À côté des initiatives de l’administration, ce sont les milieux monastiques qui ont donné une impulsion majeure à l’émergence et à l’élaboration d’une langue capable de concurrencer le grec dans des usages non privés, comme on a pu s’en rendre compte à partir de l’étude de trois dossiers documentaires nouveaux ou mal connus. Le premier, le codex gréco-copte du Louvre (VIe siècle), totalement inédit, atteste l’utilisation du copte dans un contexte fiscal sous l’impulsion d’une institution monastique. Le deuxième dossier examiné est celui des quatre testaments des supérieurs du monastère de Saint-Phoibammôn, dont deux sont antérieurs à la conquête arabe ; mais, alors que le premier, celui d’Abraam, daté de la fin des années 610, est encore écrit en grec, pour le second, rédigé une quinzaine d’années plus tard et dont le testateur est Victor, c’est le copte qui est employé en toute légalité. Ce passage du grec au copte s’explique sans doute par la rupture décennale de l’Égypte avec le régime byzantin, au moment de la domination sassanide (619-629), qui, assouplissant les contraintes linguistiques pesant notamment sur la rédaction des testaments, a dû symboliquement porter atteinte à l’impératif d’exclusivité du grec dans le domaine juridique. À ce changement de cadre juridico-administratif correspondent aussi des modifications dans la fonction du testament, qui véhicule désormais un message spirituel à l’attention de l’ensemble de la communauté monastique, ce qui nécessitait le recours à une langue comprise par tous.