Résumé
Le cours de cette année a été consacré à l’étude de gaz quantiques en dimension réduite, essentiellement en dimension deux. Du fait de cette dimension réduite, le phénomène de condensation lié à la statistique de Bose-Einstein est absent, au moins à la limite thermodynamique, c’est-à-dire pour un système infini. En d’autres termes, l’ordre à longue portée qui caractérise un condensat de Bose-Einstein, c’est-à-dire la corrélation en phase de la fonction d’onde qui décrit le gaz, disparaît à deux ou à une dimension. Les fluctuations thermiques jouent en effet un rôle plus important qu’à trois dimensions, et elles viennent détruire l’ordre que la statistique ou les interactions auraient tendance à créer. C’est le physicien Rudolf Peierls, d’origine allemande, mais travaillant en Angleterre à partir de 1933, qui a le premier formalisé cette perte possible de l’ordre à longue portée dans les systèmes de dimensions réduites. Il ne s’intéressait pas aux condensats de Bose-Einstein, mais à l’ordre d’un solide et il a montré qu’un cristal ne pourrait pas exister dans un monde uni ou bidimensionnel. Dans ce cours, nous avons d’abord examiné les arguments de Peierls à une, puis à deux dimensions. Nous avons ensuite décrit quelques expériences récentes menées sur des colloïdes, qui ont permis de tester la prédiction de Peierls. Nous avons également montré que l’absence d’ordre cristallin n’entraîne pas un désordre complet : ces assemblées colloïdales peuvent être « presque » cristallines à basse température, avant de devenir complètement liquides à température plus élevée. Cela a constitué notre première rencontre avec une transition de phase induite par des défauts topologiques, concept formalisé par Berezinskii d’une part, et par Kosterlitz et Thouless d’autre part (BKT).