Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Paul-Louis Courier, ancien officier devenu journaliste, serait au premier rang de ces combattants littéraires : il invente le pamphlet moderne et meurt assassiné. Après lui viendraient Armand Carrel, lui-même lieutenant avant de devenir journaliste, mort lors d’un duel avec Émile de Girardin en 1836, puis Henri de Latouche, auteur de Fragoletta, connu pour son fiel, puis Béranger, le chansonnier républicain, Lamennais et Montalembert, militants catholiques, Louis de Cormenin, etc. Barbey d’Aurevilly pourrait constituer le terme de la liste, à moins que, décidant d’y intégrer Chateaubriand au départ, on ne se retrouve tenté de la compléter de l’autre côté jusqu’à Léon Bloy.

Ces combattants peuvent souvent être disposés par couples : à Latouche et sa « camaraderie littéraire » répond Gustave Planche et sa « haine littéraire » ; Nisard et Janin s’opposent sur la question de la littérature facile ; si Granier de Cassagnac attaque en « ligne droite », Janin préfère la « ligne courbe » ; Veuillot s’oppose à Granier de Cassagnac, comme le sacré et le profane, mais il s’oppose aussi à Proudhon comme une violence de droite se distingue d’une violence de gauche.

Au centre de ce réseau, on ne cesse de retrouver Sainte-Beuve, qui connaît tous ces combattants, a écrit des articles importants sur tous. La relation de Sainte-Beuve et Balzac, plutôt que celle de Sainte-Beuve et Hugo, est un modèle de guerre littéraire. Du reste, comme il l’avoue lui-même, tous les écrits du critique s’avèrent placés sous le signe de la revanche.

Paul-Louis Courier (1772-1825) fut un grand écrivain de la IIIe République, mort avec elle et avec la fin de l’anticléricalisme dont il s’était fait le champion. Il revint à Janin de le décrire comme un pamphlétaire : mais le mot, alors, prenant le sens qu’on lui connaît aujourd’hui, est un néologisme que Courier lui-même emploie peu. Il est officier d’artillerie de la Révolution et de l’Empire, en même temps que savant helléniste. Sa carrière militaire est peu brillante en raison de son indiscipline. Il se décrit comme canonnier et vigneron, très attaché à son identité de propriétaire terrien de l’Indre-et-Loire. Ayant quitté l’armée en 1809, il la rejoint à nouveau pour Wagram, puis déserte durant la bataille. Il réside en Italie jusqu’à la fin de l’Empire, revient à Paris en 1824, épouse la fille d’Étienne Clavier, qui avait été professeur de grec au Collège de France. En 1816, il écrit une Pétition aux deux chambres pour prendre la défense d’un paysan qui a refusé d’enlever son chapeau devant un prêtre : c’est le début de sa carrière contre la réaction royaliste, contre l’alliance du Trône et de l’Autel. Trois ans plus tard, il écrit un premier pamphlet contre l’Académie des inscriptions et belles-lettres, pour se venger de n’y avoir pas été élu à la succession de son beau-père. En 1821, il est l’auteur d’un Simple Discours de Paul-Louis vigneron, écrit pour protester contre la souscription nationale lancée au profit du petit duc de Bordeaux pour l’acquisition du château de Chambord. Son procès est célèbre, il devient l’un des premiers condamnés aux termes de la loi de diffamation de 1819. Envoyé à Sainte-Pélagie, il en profite pour rédiger son procès. Sa grande œuvre est son Pamphlet des pamphlets de 1824, par lequel il se réapproprie le terme de pamphlet qui avait été d’abord utilisé contre lui. Albert Thibaudet lui assigne une place essentielle dans son Histoire de la littérature française de 1936, comme représentant d’une tradition pamphlétaire de gauche avec Béranger et Stendhal, avant que le pamphlet ne vire à droite.

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