Résumé
À la fin des années 30, les architectes de jardins d’Europe occidentale s’organisent au-delà des frontières. Au travers des expositions universelles, des congrès et de l’Association Internationale des Architectes Jardinistes Modernistes (AIAJM) – calquée sur les Congrès Internationaux d’Architecture Moderne (CIAM) –, les professionnels du jardin et du paysage tentent d’affirmer la position théorique et sociale d’un mouvement disparate et de petite envergure. À peine le manifeste de l’AIAJM est-il imprimé que le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale remet en question les fondements de l’Internationale paysagiste. Sous l’Occupation, les urbanistes-paysagistes et architectes paysagistes français tels qu’Henri Pasquier, Jacques Gréber, Théo Leveau, et Robert Joffet affichent leur expertise en matière d’espaces verts, de salubrité, et de protection des paysages, élargissant leur champ d’action du jardin au territoire. Les textes sur un urbanisme de la forêt, sur les sports et la jeunesse, le tourisme, le tracé des routes dans le paysage et leurs plantations s’alignent avec la rhétorique de Vichy du retour à la terre tout en prônant une modernité technique et scientifique. Nettement ancré dans la tradition, André Vera reprend ses arguments de l’entre-deux-guerres pour le style régulier – apanage du goût français – et le renouvellement de l’artisanat pour exprimer son soutien à peine voilé de la Révolution nationale. Cependant, ces tendances vers le régionalisme d’une part et la planification et la technologie de l’autre, n’impliquent pas un repli géographique des paysagistes et urbanistes sur la France occupée, mais s’inscrivent en fait dans une série d’échanges avec leurs confrères allemands, belges, italiens et américains.