La quête des bibliothèques : mission impossible ? (2)
Les découvertes clandestines : le désastre des sebbâkhîn
Nombre de papyrus littéraires proviennent de découvertes clandestines faites par les chercheurs de sebâkh – cette terre servant d’engrais qui est issue de la décomposition de détritus organiques dont les sites antiques sont si riches. Des mains de ces sebbâkhîn à celles des marchands d’antiquités jusqu’à la dispersion des papyrus dans les différentes collections papyrologiques modernes, quelques exemples choisis montrent comment les livres anciens ont pu passer par une longue chaîne d’intermédiaires, comment les données de provenance se sont perdues ou ont été maquillées par peur des autorités, comment les ensembles textuels ont été dépecés pour accroître la valeur des unités revendues, et encore comment textes littéraires et textes documentaires – qui seuls sont susceptibles de livrer des données contextuelles précises – se sont retrouvés souvent irrémédiablement désolidarisés.
Malgré les informations que l’on peut retrouver en remontant la filière par laquelle les papyrus sont arrivés dans une collection (la museum archaeology), ou encore celles fournies par l’étude matérielle des manuscrits (caractéristiques paléographiques et codicologiques), une découverte clandestine fait toujours peser sur les papyrus littéraires qui en sont issus une chape d’incertitude.
Les fouilles anciennes
D’autres papyrus littéraires proviennent néanmoins de vraies fouilles, mais la majorité d’entre eux ont été recueillis avant l’avènement de l’archéologie moderne : c’est notamment le cas des fouilles d’Oxyrhynchos. Conduites par deux philologues, B. Grenfell et A. Hunt, ces fouilles ont livré une quantité phénoménale de papyrus entre 1897 et 1907, mais l’absence de toute considération stratigraphique rend inéluctables, là aussi, les incertitudes et approximations liées à la reconstitution des fonds d’origine.
Les fouilles plus récentes
Enfin, même dans le cas des fouilles plus méthodiques, les assemblages susceptibles de provenir de bibliothèques antiques sont le plus souvent trouvés dans des contextes secondaires, notamment des dépotoirs anciens où ils étaient mis au rebut et mélangés. Entre amputation et contamination anciennes, la mise au jour de ces ensembles reflète surtout le désintérêt de leurs possesseurs et ne doit pas être surinterprétée.
