Selon la tradition désormais bien établie du cours, consacrée par l’usage de la formule « reprise et rappels », la troisième année débute par un résumé des principaux sujets et questions abordés l’année précédente. Il faut par ailleurs noter que cette première séance fut l’occasion d’accueillir les élèves de terminale L du lycée Camille Pissarro, à Pontoise, encadrés par leur professeure d’histoire, Mme Christine Guimonnet, rédactrice en chef adjointe de la revue Historiens et géographes et secrétaire générale de l’association des professeurs d’histoire et de géographie. Suivant un rythme chronologique qui s’est développé au cours des deux premières années, les enseignements de l’année 2019 ont porté sur une période d’environ deux décennies s’étendant grosso modo du début de l’insurrection grecque (1821) à la proclamation de l’édit des Tanzimat (1839). Il s’agissait clairement de deux décennies caractérisées par un enchaînement de crises et de réformes provoquées par la situation de plus en plus désespérée à laquelle se trouvait confrontée la classe gouvernante et, surtout, le sultan Mahmud II qui s’était mis en tête de transformer son empire par tous les moyens dont il disposait, à commencer par une mainmise presque totale sur l’État par l’établissement d’un régime autocratique.
Deux grandes crises se partagent presque à égalité les deux décennies étudiées. La crise grecque, soit l’insurrection de Morée et la propagation de ce mouvement au reste des territoires ottomans à forte population grecque orthodoxe, se transforma rapidement en une guerre d’indépendance qui ne prendrait fin qu’avec l’établissement d’un État grec en 1830. Ce dénouement fut particulièrement dur à accepter par l’empire, non seulement parce qu’il y perdait des territoires qu’il contrôlait depuis le XVe siècle, mais aussi parce qu’il y découvrit à quel point l’ingérence des puissances européennes représentait désormais un danger concret pour son intégrité territoriale, voire même sa survie dans un environnement politique qui lui était de plus en plus hostile. En effet, après de premiers revers, l’empire s’était ressaisi et était sur le point de reprendre le dessus lorsque l’intervention des flottes européennes à Navarin retourna la situation ; la Russie porta le coup de grâce en avançant jusqu’à Andrinople, obligeant ainsi le gouvernement ottoman à reconnaître l’indépendance de la Grèce. La seconde crise, celle de l’Égypte, domina la deuxième décennie de la période. Mehmed Ali Pacha, gouverneur d’Égypte depuis le début du règne de Mahmud II, s’était avéré un vassal utile pendant la révolte grecque qu’il avait initialement aidé à contrôler grâce à son armée équipée et entraînée à l’occidentale. Cependant, déçu par une défaite qui l’avait privé de récompenses escomptées, il se retourna contre son maître avec une efficacité et une rapidité déconcertantes. En moins de deux années, l’armée égyptienne s’empara de la Syrie et d’une bonne partie de l’Anatolie méridionale et, avançant vers la capitale, finit par menacer la souveraineté et l’existence mêmes de son suzerain. Mis au pied de mur, Mahmud dut accepter la protection intéressée de la Russie afin de maintenir un statu quo qui établissait l’autorité de fait de Mehmed Ali Pacha sur l’Égypte, le Hedjaz et la Syrie.