Résumé
Largement négligé dans le courant du XXe siècle, l’affect est progressivement réhabilité vers la fin du siècle par certains travaux en psychologie : Zajonc (1980, 2000) défend notamment l’idée que l’affect peut intervenir dans le traitement des stimuli à un niveau très précoce, qualifié de « précognitif ». En linguistique, le paradigme vériconditionnaliste s’inscrivant dans la tradition frégéenne associe le sens d’une phrase à ses conditions de vérité – un modèle dans lequel la connotation affective n’a pas sa place. Certes, depuis quelques années, les travaux se sont multipliés sur des termes ou expressions permettant aux locutrices et locuteurs de véhiculer leurs sentiments, tels les interjections, les expressifs, les insultes... Mais la dimension affective ne concerne-t-elle vraiment qu’une partie réduite du lexique ? N’est-elle pas au contraire pertinente pour la majorité des mots ? De fait, certains travaux récents en psychologie et neurosciences suggèrent qu’en langue, l’affect pourrait être cognitivement premier par rapport à l’information purement référentielle. Dès lors, quel est le statut linguistique et communicationnel de la connotation affective ? S’il convient de distinguer la connotation affective encodée linguistiquement et la connotation affective encodée culturellement, nous verrons que chacune emprunte des traits aux contenus présupposés ainsi qu’aux implicatures conventionnelles, sans qu’aucune ne se rapporte cependant entièrement à ces deux catégories. La connotation affective doit bel et bien être considérée comme un niveau de contenu spécifique, avec ses caractéristiques propres.