Amphithéâtre Maurice Halbwachs, Site Marcelin Berthelot
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Un sujet dont nous avons assez peu parlé dans nos cours est celui qui concerne les cités dans l’Empire romain. Or une partie non négligeable de nos recherches a porté sur ce sujet, qui prolongeait les cours sur les dieux des Romains par une réflexion sur les théologies romaines de la Gaule et de la Germanie, en examinant des documents épigraphiques de Gaule belgique et des Germanies, pour montrer que, très rapidement, les citoyens des colonies ou municipes fondés au début de l’Empire ont été capables de dominer tous les aspects de la théologie romaine, sur le plan public comme sur le plan privé. L’objet de ces enquêtes, que nous avons conduites avec des historiens et des archéologues, était d’éclairer et de comprendre la nature de l’impérialisme romain, la réaction qui avait été celle des peuples soumis, et la manière dont avait fonctionné l’empire. Comment un ensemble aussi vaste a-t-il pu tenir ensemble pendant pratiquement quatre-cinq siècles avec des moyens logistiques et militaires aussi réduits ? Ce fait renvoie aussi à l’acceptation de cette situation de la part des anciens ennemis, et enfin à l’habilité avec laquelle les Romains ont su gouverner leur empire. Certes, la paix romaine, comme on dit, ne fut pas le fruit d’un accouchement sans douleur. Et le pouvoir romain n’était pas particulièrement altruiste. Néanmoins les faits sont là. Les peuples soumis se sont intégrés dans l’ensemble romain, ont adopté la langue latine, le droit romain, et même assez rapidement la religion romaine.

Nous essayions pour notre part de traiter ces questions à l’aide de sources relatives à la vie religieuse. Nous avons averti dès le départ qu’il ne convenait pas de raisonner de ce point de vue à partir des empires occidentaux médiévaux et modernes. Car les religions occidentales n’étaient pas comparables à celles du monde romain. La plupart des religions du monde antique se ressemblaient, et la notion de conversion n’existait pas. Seuls des monothéismes militants peuvent susciter ce type d’exigence. Ce qui fait que les Romains n’ont jamais eu la volonté de détruire les systèmes religieux existants et de les remplacer par leurs religions. En cas de guerre ou de soulèvement, cela pouvait arriver, mais uniquement parce que les dieux des ennemis étaient considérés comme étant en guerre avec les Romains, ou encore parce que certaines pratiques religieuses, comme les sacrifices humains, étaient jugés barbares. Mais ce n’était pas du tout une conduite systématique. Et, d’ailleurs, la plupart des peuples du monde antique se conduisaient ou se seraient conduits de la même manière. C’est en somme un autre chapitre de la réflexion sur l’altérité de la religion des Romains que nous avons essayé d’écrire.