Résumé
Poser la question de ce que signifie « reprendre » n’implique pas tant de s’intéresser à la restitution, qui est l’acte de celui qui rend, qu’à la façon de reprendre des œuvres après un conflit armé en 1815 : comment on reprend, qui reprend, et dans quelles conditions ?
L’analyse des corrélations entre les actions militaires et le musée et l’exploration des enjeux diplomatiques liés à l’appropriation et aux restitutions des objets confisqués depuis 1794 révèle que les premières demandes de récupération du patrimoine annexé ont été introduites très précocement par les puissances européennes, mais qu’elles se sont presque systématiquement heurtées au refus de la France de rendre ce qu’elle considère comme ses plus beaux trophées de victoires.
Alors que l’entrée des troupes coalisées dans Paris en 1814 aurait pu ouvrir la voie à un retour rapide des œuvres dans leur pays d’origine, les armées alliées font d’abord le choix, dans un moment qu’on peut qualifier d’hésitation patrimoniale, de laisser le Louvre plus ou moins intact moyennant quelques arrangements secrets.
Le véritable tournant dans l’histoire de ces collections n’intervient donc qu’après les Cent-Jours, lorsque la colère qu’a suscitée le retour de Napoléon et la nécessité de le vaincre à nouveau conduisent les Prussiens et les Britanniques à orchestrer, au nom de tous les États spoliés, une reprise manu militari de leurs biens culturels respectifs.