L’épigénétique étudie les molécules et mécanismes modifiant l'expression des gènes alors que la séquence d’ADN est inchangée. La méthylation de l’ADN est une marque épigénétique très étudiée pour son rôle dans la différenciation cellulaire et comme biomarqueur de certaines maladies comme le cancer ou d’exposition à des facteurs de risque environnementaux. Si les effets du vieillissement et du tabagisme sur le « méthylome » humain sont aujourd’hui bien connus, les effets épigénétiques de nombreux autres facteurs, en particulier liés à l’immunité, restent à déterminer.
Dans le cadre du projet Milieu Intérieur, des chercheurs de l’Institut Pasteur, du CNRS, de l’Institut Karolinska (Suède) et de l’Université de Colombie Britannique (Canada), dont le Pr Lluis Quintana-Murci titulaire de la chaire Génomique humaine et évolution du Collège de France ont mesuré les effets de 140 variables liées au mode de vie et à l’immunité sur le méthylome de 958 donneurs sains.
Leurs analyses, publiées le 7 octobre 2022 dans Nature Communications, révèlent qu’une infection virale très commune dans la population générale, due au cytomégalovirus, modifie les niveaux de méthylation du génome des personnes infectées, en dérégulant un facteur de transcription utilisé par le virus pour entrer en phase latente. Cette étude montre également que les effets de l’âge sur le méthylome ont été surestimés, car nombre de ces effets sont en réalité dus aux effets de l’âge sur la composition cellulaire sanguine. De plus, les chercheurs ont montré que les différences épigénétiques entre individus augmentent avec l’âge, suggérant une altération de la maintenance des niveaux de méthylation au cours du vieillissement. Enfin, une analyse intégrative des différents facteurs affectant le méthylome suggère que la génétique contrôle une plus grande part de la variation épigénétique que l’environnement, en contradiction avec les hypothèses actuelles impliquant des effets environnementaux forts sur l’épigénome humain.