Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Après deux années consacrées à Proust (« Mémoire de la littérature », « Morales de Proust »), et deux années à l’écriture de vie (une première année générale et large, une seconde année exclusivement sur Montaigne), on a tout à fait changé de sujet et abordé l’époque contemporaine dans un projet pluridisciplinaire et interculturel.

Depuis longtemps, j’avais l’idée de mener une recherche sur une année, de la suivre tout du long, mois après mois. Ce serait faire le roman d’une année, la revivre à son rythme, sous tous ses aspects, dans tous ses détails, lire tous les livres, parcourir toute la presse, voir tous les films, écouter la radio, regarder la télévision, se replonger dans la vie quotidienne, les chansons, la publicité, la mode, etc.

Ce fantasme, peu original, pourrait remonter à un souvenir des Misérables où un chapitre porte le titre « 1817 » (t. I, livre III, chapitre I) et commence ainsi : « 1817 est l’année que Louis XVIII, avec un certain aplomb royal qui ne manquait pas de fierté, qualifiait la vingt-deuxième de son règne. C’est l’année où M. Bruguière de Sorsum était célèbre. Toutes les boutiques des perruquiers, espérant la poudre et le retour de l’oiseau royal, étaient badigeonnées d’azur et fleurdelysées. » Suit un copieux résumé énumérant tous les faits et gestes les plus significatifs comme les plus insignifiants. Tous les événements sont ainsi rappelés et mêlés : faits divers, drames, catastrophes, naufrages. Viennent ensuite les rengaines, les scies, la nécrologie.

Hugo est né en 1802, il a 15 ans en 1817 ; il revoit sa jeunesse, se souvient d’anecdotes, mais il a aussi enquêté, compilé. Et pourtant, 1817 est une année qui ne compte pas pour l’histoire, c’est une année creuse. « Voilà, pêle-mêle, ce qui surnage confusément de l’année 1817, oubliée aujourd’hui », juge-t-il.

Pourrait-on en dire autant de 1966 ? Année oubliable dont on voudrait dégager un pêle-mêle de détails pour en faire la « physionomie », relever ses incidents négligés par l’histoire, l’écume de ses jours.