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Présentation de la chaire
Les Lumières désignent à la fois un moment historique, un idéal philosophique et un héritage intellectuel. Cette polysémie en fait la complexité et l’intérêt. Comme période, elles correspondent à un long dix-huitième siècle, marqué de profondes transformations, notamment la crise des sociétés d’ordre, le développement de nouveaux savoirs et l’essor de la mondialisation économique et de l’expansion européenne. Comme pensée philosophique, les Lumières n’ont pas la cohérence qu’on leur prête trop souvent. Elles combattent les préjugés au nom de la capacité des individus à raisonner de façon autonome, mais elles sont surtout un espace de débat, un exercice de réflexion sur les ambivalences de la modernité. Enfin, les Lumières sont, depuis deux siècles, un récit des origines de la modernité libérale : un héritage intellectuel, tendu entre le réformisme prudent et l’horizon utopique, suffisamment puissant pour être la source presque intarissable du progressisme, suffisamment imprécis pour permettre d’inlassables conflits d’interprétation.
L’objet de cette chaire est d’articuler ces différentes dimensions, dans une perspective interdisciplinaire, en insistant sur la double historicité des Lumières dans la longue durée, du XVIIIe siècle à nos jours. Les Lumières ne sont pas seulement une époque révolue, mais aussi la source de questions toujours actuelles, qu’il s’agisse de la place de la religion dans les sociétés sécularisées, de l’organisation de l’espace public, des ressorts de l’autorité scientifique ou des limites de l’universalisme. Les enseignements donnés dans le cadre de cette chaire visent ainsi à rendre compte de la diversité des Lumières et de leurs interprétations, à l’échelle européenne, mais aussi dans un contexte mondial, impérial puis postcolonial. Ils cherchent à appréhender autrement l’héritage des Lumières, hors de toute simplification, en explorant ses contradictions et ses zones d’ombre, mais aussi sa persistante actualité.