Dans un environnement donné, les groupes humains s’insèrent dans une pyramide trophique de production de la biomasse. Un aspect essentiel de leur succès adaptatif dépend de la capacité porteuse de ce milieu, c’est-à-dire de la taille maximale de la population que ce milieu peut supporter par unité de surface. Les variations de ce paramètre expliquent les variations importantes de taille de territoire exploité que l’on observe d’une région à l’autre chez les chasseurs-collecteurs. Au cours de l’évolution des hominines, leur succès reproductif n’a pas dépendu uniquement de facteurs environnementaux et biologiques, mais de façon croissante de facteurs techniques et sociaux. L’énergie extraite de l’environnement est consommée par le métabolisme basal des individus, par leur activité physique et par l’effet thermique de l’alimentation elle-même.
En ce qui concerne le métabolisme basal, chaque système et chaque organe présentent des niveaux de consommation très différents. Si l’on met de côté l’activité physique, au cours de l’existence de chaque individu, l’énergie disponible doit être allouée à trois grandes fonctions qui sont la croissance, la maintenance et la reproduction, et un compromis doit être réalisé entre ces différentes nécessités. C’est ce que recouvre le terme de théorie des histoires de vie. D’un organisme vivant à l’autre, des stratégies adaptatives très différentes ont ainsi été adoptées. L’investissement énergétique revêt aussi une dimension temporelle et ces stratégies adaptatives se traduisent notamment par des traits démographiques (fécondité, durée de la croissance, longévité, etc.) qui varient considérablement d’un organisme à l’autre. Les grands primates, et l’homme en particulier, se caractérisent par une maturation lente, une première reproduction tardive, une longévité importante et un fort investissement parental dans un nombre limité de petits dont le taux de survie est élevé. L’histoire de vie humaine amplifie ces traits et le caractère séquentiel de la trajectoire de croissance qui présente un fort investissement dans le développement cérébral, puis dentaire, puis somatique jusqu’à l’accès à la reproduction.
Une autre particularité est l’âge très précoce du sevrage qui permet à la mère d’avoir un autre enfant alors même que le premier n’a pas terminé son développement cérébral. Ce sevrage précoce permet en effet la participation d’autres individus que la mère au fort investissement énergétique que représente le cerveau en développement des jeunes enfants. D’une façon générale, le niveau élevé du métabolisme basal humain et la consommation énergétique toujours croissante des individus se traduisent par une baisse de la fécondité dans de nombreuses sociétés humaines.