À l’orée du XXe siècle
Des questions majeures sur l’univers
En lever de rideau, quelle était l’image de l’univers que la science proposait au début du XXe siècle ? Notre Galaxie, avec sa Voie lactée, était déjà assez bien connue et sa dimension de même que la diversité des étoiles qui la composaient avaient été explorées tout au long du siècle précédent, depuis les mesures de William Herschel. Emmanuel Kant avait spéculé sur l’existence d’autres galaxies semblables, des « univers-îles », sans que l’observation ait pu trancher. L’au-delà de notre Galaxie demeurait une interrogation majeure. Néanmoins, un résultat fondamental paraissait acquis. Depuis les travaux de Galilée près de trois siècles plus tôt, l’idée que les lois physiques, découvertes en laboratoire sur Terre, s’appliquaient dans tout l’univers était désormais l’hypothèse de travail considérée comme la plus satisfaisante. Cette hypothèse avait été celle de Newton, assignant une propriété universelle à la gravitation dont il constatait la présence sur Terre et dans le système solaire. De même, la spectroscopie, développée depuis les travaux de Fraunhofer (1814), laissait également penser que la matière, avec la diversité des éléments chimiques, était fondamentalement la même partout dans l’univers.
Deuxième interrogation : d’où le Soleil tire-t-il son énergie ? Les études géologiques avaient montré que la Terre avait un âge d’au moins plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’années, et la présence de plantes anciennes dans les fossiles montrait que le Soleil devait avoir brillé d’une manière quasi uniforme pendant de très longues durées. Il était aisé de montrer qu’une matière combustible, si le Soleil en avait été constitué, ne pouvait permettre une telle durée. D’autres tentatives, comme celle d’assigner l’énergie rayonnée par le Soleil à une chute permanente de météorites, ne résistaient pas à l’analyse. La source de l’énergie solaire demeurait donc un mystère.
Troisième interrogation : qu’entendait-on par univers et quel devenir assigner à celui-ci ? Dans son Introduction au système du monde (1796), Pierre Simon de Laplace avait proposé, sous le nom de nébuleuse primitive, une vision de la formation du système solaire sous l’effet de la gravitation, à partir d’un nuage antérieur de gaz. Mais les interrogations cosmologiques plus profondes, portant sur l’extension de l’univers, sur son apparente permanence, sur son âge, éventuellement sur son devenir, étaient très fragiles. Isaac Newton, considérant la force de gravitation s’exerçant entre les étoiles, qui est toujours attractive, avait correctement conclu qu’elle ne pouvait, seule, conduire à un état éternellement stable. Il avait donc postulé l’existence d’une force répulsive pour l’équilibrer, d’origine inconnue et dotée d’un statut quasi théologique. Une stabilité durable de l’univers était à ce prix.