Amphithéâtre Marguerite de Navarre, Site Marcelin Berthelot
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Au cours de l’année 1819, les efforts pour légiférer sur la liberté de la presse d’une part, et sur le duel d’autre part, se déploient en parallèle, sans qu’aucune réelle préméditation ait guidé ce parallélisme. Il s’agit de remédier à un vide légal qui tient à ce qu’aucune loi, ni sous la République ni sous l’Empire, n’a remplacé les édits d’Ancien Régime qui interdisaient le duel. Le député Clausel de Coussergues fait une proposition de loi pour que soit restaurée l’autorité de l’État : dans le duel, le monopole de la violence légitime est contesté ; les juges, confinés à leur pouvoir d’application des lois, sont forcés d’utiliser les seules lois disponibles, qui pensent en termes d’homicide et de blessure volontaires, conduisant à des peines trop élevées pour le duel. Jusqu’en 1832, ils ne disposent pas non plus de la notion de circonstances atténuantes. Il importe de rendre au souverain le pouvoir de faire la justice, contre toutes les justices privées.

C’est à Eugène Cauchy, frère du mathématicien et archiviste de la Chambre des pairs, que l’on doit dans un livre de 1846 le rapprochement des deux efforts législatifs : non seulement parce que, dans le cas du duel comme dans celui de la liberté de la presse, le pouvoir judiciaire est confié à des jurys d’assises susceptibles de jouer le rôle de pouvoirs modérateurs, mais parce que l’effort même pour juger et sanctionner les délits de presse paraît la meilleure législation possible pour empêcher le duel. En rétablissant un équivalent des tribunaux de maréchaux d’Ancien Régime, on régule la nécessité du recours au duel, et on ramène l’exercice de la justice vers le pouvoir public. Gabriel Tarde, dans son texte de 1892 sur le duel, juge de même : c’est le pouvoir démesuré de la presse, « arme à longue portée de la calomnie », qu’il faut amoindrir.

Aucune législation sur le duel ne verra le jour jusqu’à la Première Guerre mondiale : en 1819, en 1829, de brefs moments libéraux sont suivis par des moments de retour à l’autoritarisme et au contrôle préalable de la presse, qui rendent inutile toute législation sur le duel. Le nombre des duels augmente à nouveau fortement après 1830, en période de trouble politique où la puissance de l’État paraît insuffisante pour que la justice puisse être assurée par lui. Même les représentants de l’État y ont recours, comme en témoigne le duel célèbre qui oppose Benjamin Constant au marquis Forbin des Issarts, tous deux députés, – le duel se fait assis en raison de l’infirmité de Constant, et épargne les deux duellistes. L’autre duel célèbre est celui du comte Philippe-Paul de Ségur et du baron Gaspard Gourgaud, tous deux anciens généraux d’Empire, à propos d’un récit de la campagne de Russie que publie le premier, et dont le second conteste l’authenticité, au prétexte que Ségur n’aurait été qu’un général d’antichambre. La plainte en diffamation étant inenvisageable dans leur cas, ils ont recours au duel et y sont tous deux blessés.

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