Pouvez-vous vous présenter brièvement et nous rappeler votre parcours professionnel ?
Mon parcours professionnel a commencé dès le stage d’observation, en classe de 4e, où nous devions passer une journée au sein d’une entreprise. C’est ce stage qui a été déterminant pour la suite de ma carrière professionnelle. J’avais fait le choix de passer cette journée d’observation à l’atelier de restauration de l’École polytechnique située à Palaiseau. Cette journée, passée dans l’atelier de restauration, m’a énormément intéressée et c’est la raison pour laquelle j’ai fait le choix d’y effectuer mon stage d’une semaine demandé en classe de 3e. Durant cette semaine, j’ai pu découvrir le métier de relieur doreur avec le travail du papier et du cuir et cela m’a donné envie de me former à ce métier en lien avec ce travail. Ainsi, après une seconde générale, je me suis inscrite à une formation de deux années me permettant d’obtenir un certificat d'aptitude professionnelle (C.A.P) en reliure et dorure.
Suite à ce CAP, j’ai obtenu le brevet des métiers d’arts (reliure et dorure) puis le diplôme des métiers d’arts. Au total, la période de formation au métier de relieur doreur, un « métier passion » a duré six années.
Une fois diplômée, les choses n’ont pas été simples, car les opportunités dans ce domaine d’activité étaient rares. Après six mois dans un petit atelier familial en province en tant que doreur, j’ai essayé l’auto-entreprenariat, mais j’ai eu très peu de commandes et j’ai rapidement été contrainte d’arrêter mon activité pour occuper des postes alimentaires. Après trois années pendant lesquelles j’ai exercé des fonctions éloignées de ma formation initiale et de ma passion, j’ai recherché activement un poste et j’ai eu l’opportunité, le 1er juillet 2021, d’être recrutée au Collège de France en qualité de relieur au sein de la direction des Bibliothèques Archives et Collections.
Quelles sont vos principales missions au sein du Collège de France ?
En tant que relieuse au Collège de France, je réalise toutes les étapes d'une reliure à partir des exigences esthétiques et fonctionnelles des demandes émanant des douze bibliothèques de l’établissement. Je réalise aussi la restauration de livres. J’exerce mon activité seule dans un atelier situé sur le site de Cardinale-Lemoine – Institut des Civilisations.
Concrètement, chaque mois, je reçois les commandes de deux bibliothèques et nous choisissons ensemble les matériaux sur lesquels je vais travailler pour les reliures ou les restaurations demandées.
Enfin, je suis également sollicitée par ma hiérarchie dans le cadre des installations des expositions pour réaliser notamment des supports pour les ouvrages et objets exposés.
Racontez-nous un moment fort de votre carrière professionnelle
Sans hésiter, je pense à ma première installation d’exposition « Le papyrus dans tous ses États, de Cléopâtre à Clovis », au Collège de France, pour laquelle il m’a été demandé de réaliser un support pour des petits médaillons exposés ainsi que des protections « interfaces » entre le support et les œuvres exposées.
Il y a également un autre moment fort que j’ai vécu durant ma formation, il s’agit de ma participation au concours des Meilleurs Apprentis de France pour lequel j’ai reçu la médaille d’argent départemental (Paris), meilleure note nationale cette année-là. Et j’en suis très fière !
Avez-vous rencontré un obstacle dans votre carrière et comment l’avez-vous surmonté ?
J’ai effectivement rencontré un obstacle lors d’un stage effectué dans le cadre de ma formation professionnelle. Je me suis heurtée à un maître de stage ayant des propos sexistes du type « Tu n’es bonne à rien... Tu n’as pas assez de force pour utiliser nos outils ».
Ce fut une période difficile et décourageante pendant laquelle j’ai remis en question mes choix d’orientation professionnelle. Pendant longtemps, le métier de relieur était occupé majoritairement par des hommes. Les femmes ne faisaient que la couture. Aujourd’hui, on observe une tendance différente, car le métier est plus féminin que masculin.
Avec le recul, je pense que cette expérience a forgé mon caractère et réaffirmé mon souhait de poursuivre dans cette voie. Aujourd’hui, j’exerce un métier qui me passionne et je suis heureuse de ne pas avoir renoncé à poursuivre ce chemin.
Quel conseil donneriez-vous aux personnes souhaitant travailler en soutien à la recherche ?
Selon moi, quel que soit le secteur d’activité dans lequel nous travaillons, il faut se donner les moyens pour atteindre ses objectifs « si on veut, on peut ».
Concernant le milieu de la recherche, je pense que le conseil que je peux donner aux personnes souhaitant y travailler, c’est avant tout d’être curieux !