Deux journées de colloque consacrées à la notion de majorité auront lieu les 13 et 14 mai 2009 au Collège de France. Elles sont organisées par le Professeur Jon Elster et Stéphanie Novak dans le cadre de la Chaire Rationalité et Sciences Sociales. L’ambition de ce colloque est d’étudier la majorité sous la diversité de ses aspects sociologique, anthropologique, historique, politique, philosophique et psychologique. Il s'agira en outre de considérer une large variété de types de décisions, dont les décisions de comités, les votes d'assemblées, les élections et les référendums. En effet, les recherches contemporaines se sont concentrées sur les questions formelles que soulève l’agrégation des voix, comme le théorème du jury et le paradoxe du vote formulés par Condorcet. Bien que cet aspect reste essentiel, on peut penser qu’une perspective élargie se révèlera fructueuse.
On distinguera le principe de majorité de sa mise en œuvre.
Lorsque la majorité est envisagée comme principe se pose la question de la légitimité et de la justification des décisions majoritaires. C'est pourquoi on explorera les origines et l'histoire de ce principe, et notamment la relation entre sanior pars et major pars. En outre, on confrontera le principe de majorité avec ceux du tirage au sort, de la majorité qualifiée, et de l’unanimité. On s'intéressera au principe de majorité absolue en tant qu'il est opposé d'une part à la majorité simple et d'autre part à la majorité relative. Concernant ce dernier point, on passera en revue les différentes règles formelles et informelles utilisées lorsqu'aucun candidat ne reçoit plus de la moitié des voix. On considèrera les règles établissant le quorum, leur justification et leur importance. Un autre problème soulevé sera celui des systèmes de double majorité dans les fédérations (ou l'Union européenne) où parfois la majorité est requise à la fois au niveau des individus et à celui des États membres. Enfin, on s'interrogera sur le fait curieux de la soumission de la minorité à la volonté de la majorité même lorsque le résultat des votes est de 51 % des voix contre 49 %. Dans la mesure où ce fait peut être expliqué par l'attente d'une alternance au pouvoir, on abordera le problème des minorités permanentes et de leur protection par des contraintes constitutionnelles.
On envisagera la mise en œuvre du principe de majorité en se demandant comment les modalités « techniques » du vote peuvent avoir des conséquences sur le contenu des décisions.
On abordera notamment les problèmes suivants :
- Quelles sont les conséquences selon que le vote se produit par comparaison de la puissance des cris des camps rivaux (comme à Sparte), par assis et levé, à main levée, par acclamation, par appel nominal ou par le constat d’une majorité par le président d’assemblée ou de comité ?
- Le vote est-il public ou secret ?
- Les votants se prononcent-ils simultanément ou successivement (Bentham) ?
- Le vote est-il nécessairement précédé d'une discussion (Rousseau, Harrington) ?
- En cas d'égalité des voix, comment départage-t-on les options ex aequo (par le tirage au sort ou en attribuant une double voix au président) ?
Les intervenants seront : Olivier Beaud, Olivier Christin, Jon Elster, Aanund Hylland, Samuel Issacharoff, Hélène Landemore, Gerry Mackie, Stéphanie Novak, Pasquale Pasquino, Adam Przeworski, Dominique Reynié, Pierre Rosanvallon, Melissa Schwartzberg, Philippe Urfalino, Adrian Vermeule.