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Le cerveau statisticien : la révolution Bayésienne en sciences cognitives

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L'organisation du cerveau humain résulte de multiples évolutions enchâssées, un « bricolage » (Jacob, 1977) ad hoc de systèmes les plus divers sélectionnés pour leur valeur de survie, sans garantie d'optimalité. C'est pourquoi bon nombre de neurobiologistes et de psychologues cognitifs estiment qu'il ne saurait y avoir de théorie mathématique universelle du cerveau, mais seulement des modèles restreints de compétences cognitives spécifiques. À l'encontre de cette idée répandue, toutefois, un vaste courant récent des sciences cognitives s'appuie sur la théorie mathématique de l'inférence Bayésienne pour modéliser une très grande diversité de phénomènes psychologiques : perception, inférence statistique, prise de décision, apprentissage, traitement du langage... La rapidité avec laquelle cette théorie envahit et unifie divers domaines de la cognition, la simplicité de ses fondements axiomatiques, et la profondeur de ses conclusions justifient de parler d'une véritable « révolution Bayésienne » en sciences cognitives. Le cours 2012 visait à en expliquer les principes.

Pour résumer, la théorie Bayésienne fournit un modèle mathématique de la manière optimale de mener un raisonnement plausible en présence d'incertitudes. Dès la naissance, le bébé semble doté de compétences pour ce type de raisonnement probabiliste. L'inférence Bayésienne rend également bien compte des processus de perception : étant donné des entrées ambigües, le cerveau en reconstruit l'interprétation la plus probable. La règle de Bayes indique comment combiner, de façon optimale, les a priori issus de notre évolution ou de notre mémoire avec les données reçues du monde extérieur. En cela, elle offre une nouvelle vision de l'apprentissage qui dépasse le dilemme classique entre théories empiristes et nativistes. Enfin, de nombreuses décisions humaines semblent résulter d'une approximation de la règle Bayésienne d'accumulation d'évidence, combinée à une estimation de la valeur attendue des conséquences de nos choix. Dans la mesure où les principes de l'inférence Bayésienne sont ainsi partagés par de multiples domaines de la cognition, il se pourrait que l'architecture du cortex ait évolué pour approximer ce type de calcul probabiliste à grande vitesse et de façon massivement parallèle. L'algorithme utilisé pourrait expliquer non seulement l'organisation du cortex en couches, mais aussi la manière dont notre cerveau anticipe sur le monde extérieur (codage prédictif) et dont il répond à la nouveauté (propagation des signaux d'erreur).

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