Le deuxième cours était plus mécanistique et portait sur les notions modernes de l’épigénétique. Au tournant des années 1980-1990, le terme connaît une renaissance en changeant de sens. Cette évolution sémantique fait suite à la réalisation du fait que certains changements dans l’expression des gènes sont transmis au travers des divisions cellulaires, voire des générations dans certains cas, et cela, sans que la séquence d’ADN soit elle-même changée. Le lien entre cette transmission d’un état d’expression et une modification de l’ADN, la méthylation, a conduit le généticien australien Robin Holliday à redéfinir l’épigénétique en 1994 comme l’étude des changements d’expression des gènes transmissibles au travers des divisions cellulaires, voire des générations, sans changement de la séquence de l’ADN. Peu de temps après est apparue l’idée d’une mémoire épigénétique reposant non seulement sur la méthylation de l’ADN, mais aussi sur des modifications chimiques des histones et d’autres protéines qui leur sont associées. La recherche actuelle se concentre sur les protéines « écrivaines », qui établissent ces modifications chimiques des histones, et des protéines « lectrices », qui se lient aux histones modifiées, ainsi qu’aux mécanismes qui permettent la propagation de ces modifications au cours des divisions cellulaires.
Enfin, l’exploration de la chromatine dans ses variations intimes a conduit à un nouvel usage du terme d’épigénétique. C’est Adrian Bird qui, en 2007, formalise ce second changement sémantique depuis Waddington : l’épigénétique peut être considérée comme l’étude des « adaptations structurales des régions chromosomiques qui permettent d’enregistrer, de marquer ou de perpétuer des états modifiés d’activité des gènes ». Cette définition va donc au-delà du concept, plus strict, d’un changement héritable des fonctions des gènes proposé par Holliday. Je me suis efforcée de faire une revue très à jour des bases moléculaires des processus épigénétiques, en soulignant les grandes questions qui restent ouvertes et qui forment la bases de nos recherches actuelles.