Si, comme l'écrivait Hérodote, l'Égypte est un don du Nil, alors la Mésopotamie est un don du Tigre et de l'Euphrate, puisqu'une grande partie de la région connaît un climat trop aride pour permettre l'installation permanente de sociétés agraires sans recours à l'irrigation. On en a, trop rapidement, déduit que celle-ci avait été le moteur du développement de « sociétés hydrauliques » où prêtres et rois commandaient à l'organisation d'une agriculture centralisée. Cette image d'Épinal doit aujourd'hui être nuancée, au profit d'une approche mettant en valeur la variété, dans le temps comme dans l'espace, des interactions entre les sociétés et leur environnement. La Mésopotamie est en réalité plurielle : sa géographie, son climat, et avec eux les possibles mises en valeur du territoire, varient à l'échelle régionale et locale, tandis qu'au fil des millénaires, fluctuations climatiques et changements dans le cours des fleuves ont forcé les groupes humains à s'adapter – modifiant en retour leur environnement. Des villages du Néolithique aux empires de l'âge du fer, en passant par les cités-États et les royaumes territoriaux de l'âge du bronze, l'espace mésopotamien a été le théâtre d'expériences sociales multiples, qui toutes ont eu leur façon propre de s'inscrire dans le milieu environnant.
Dans le cadre de ce cycle de conférences, nous inscrirons les relations entre sociétés et environnements de Mésopotamie dans le temps long de l'histoire, usant d'une approche pluridisciplinaire qui convoque tour à tour les sciences naturelles, l'anthropologie, l'archéologie des paysages, l'histoire environnementale comme celle des techniques, des cultures et des mentalités. En combinant données matérielles et sources écrites se dessinera une vision nuancée et dynamique de ces relations, attentive aux singularités et à la richesse des expériences humaines, ce qui amènera à interroger les grands modèles explicatifs communément associés avec ces périodes parmi les plus anciennes de l'histoire humaine.