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Colloque « Quand un coran se fait un nom. Trajectoires et implications »

Armoire métallique

Ce colloque, organisé par Alya Karame, Fellow – Paris Région, et la chaire Histoire du Coran – Texte et transmission, se tiendra à l'Institut des Civilisations du Collège de France (52 rue Cardinale Lemoine – Salle Françoise Héritier), le 11 octobre 2024, de 9h30 à 18h.

English version below.

Qu’est-ce qui fait d’une œuvre d’art un chef d’œuvre ? Quels éléments doivent être présents pour qu’elle soit appréciée comme une réussite artistique ? et qui est responsable de décider quel manuscrit passe l’épreuve du temps ? En arabe, le terme tuḥfa connote l’objet idéal, complet, le cadeau rare, l’œuvre difficile ou la pièce unique maitresse. Ces notions apparaissent comme essentielles pour distinguer des manuscrits coraniques (maṣāḥif, sing. muṣḥaf). Les historiens de l’art spécialistes des corans racontent les histoires de ces manuscrits à travers des études paléographiques, codicologiques et d’histoire de l’art. Le choix de ces manuscrits a été surement limité par leur survie et accessibilité, et justifié par rapport à leur importance historique et esthétique -y inclus leur patronage. En devenant célèbre, ces manuscrits commencent à être considéré comme des chefs d’œuvre, et deviennent immortels, ce qui influe non seulement sur les analyses actuelles, mais aussi sur leur perception en général, ainsi que sur leur valeur économique sur le marché de l’art et donc aussi les pratiques des collectionneurs.

La recherche sur des manuscrits coraniques spécifiques, leur promotion au rang de chef d’œuvre – qu’il s’agisse de feuillets dispersés ou de volumes reliés – devient de plus en plus courante. Plusieurs articles ont été publiés avec le but d’identifier l’origine des manuscrits, leur style d’écriture et décoration, en discutant les milieux de production -y compris les idées religieuses, dévotionnelles ou esthétiques qui les ont entourés. De plus, des tentatives ont été faites pour regrouper des spécialités différentes autour d’un seul manuscrit coranique, pour l’observer plus exhaustivement dans un contexte de réseaux artistiques transrégionaux et trans-temporels.

Cette conférence a pour but d’évaluer les progrès qui ont été faits à travers l’émergence de ces manuscrits coraniques célèbres, mais aussi de réfléchir à ce qui a été perdu ou ignoré pendant ce processus. C’est donc une invitation à réfléchir l’écriture de l’histoire du coran à travers le phénomène de création de manuscrits ‘stars’. Examiner les modes culturels et artistiques de production qui ont permis ce jugement, en histoire et dans la littérature moderne, c’est ouvrir un espace pour pouvoir questionner les éléments constitutifs de cette célébrité et qui ont fait qu’un coran est devenu plus connu qu’un autre. Bien que la question au centre de la conférence soit la création d’un manuscrit comme tuḥfa, l’objectif est aussi de pousser au-delà de la discussion des styles esthétiques – leurs continuités et ruptures, leur contextualisation et circulation – vers des enquêtes différentes qui peuvent informer notre interprétation moderne de divers concepts comme l’original, la falsification, l’appropriation ou même la création de mythes. C’est également un appel à complexifier les récits qu’on raconte de certains manuscrits qui entrent en résonnance avec l’écriture de l’histoire de l’art islamique en général.