Une coproduction Collège de France – CNED
Extrait
« La biologie est, de toutes les sciences, la plus proche de l’existence des hommes. C’est, après tout, la seule qui promet, de manière plausible, de réduire les souffrances que provoque la maladie, de mettre un terme aux famines, de lutter contre la mort, la seule qui donne à penser que nous parviendrons à comprendre l’Esprit, le pneuma des grecs. La biologie est la science expérimentale par excellence, et même si elle est régie par les mêmes lois que la physique et la chimie, la biologie n’a pas l’exactitude de ces disciplines. Les objets biologiques sont trop complexes, insuffisamment circonscrits pour qu’on puisse les décrire au moyen de théories générales – les théories, en biologie, sont au mieux probabilistes. Les approches méthodologiques qui ont été utilisées au cours des dernières décennies pour explorer le vivant ont apporté au monde du vivant une notion d’unité jusque là insoupçonnée. Ces approches n’ont peut-être pas produit de grandes théories unificatrices et prédictives du fonctionnement du vivant, mais nous pouvons en tout cas parler aujourd’hui d’une grande synthèse.
L’étude du développement occupe une place centrale en biologie. Les forces qui guident l’œuf dans son développement jusqu’à ce qu’il devienne un organisme multicellulaire, doté d’une forme qui lui est propre, et de caractéristiques biologiques et comportementales particulières, ont des siècles durant fasciné les observateurs de la nature. Les philosophes présocratiques, tout comme Aristote, se sont beaucoup employés à essayer de comprendre comment étaient générés les animaux. C’est à Aristote, dont les idées allaient prévaloir jusqu’au XVIIe siècle, que l’on attribue les premières descriptions formelles du développement. La pensée biologique n’a jamais été très éloignée des mouvements philosophiques ni de la religion – comment le pourrait-elle ? – comme le montrent les débats séculaires entre physicalisme et vitalisme, l’influence du cartésianisme sur les lois de la biologie, ou encore, celle du romantisme allemand… »