Le but de l’intervention est d’examiner le rôle que joue le problème de l’excuse de l’ignorance dans les réflexions médiévales sur le statut de la foi et de l’incroyance. Il s’agit, au moyen d’une enquête archéologique, d’identifier quand et comment le syntagme fides falsa a pu cesser d’être un oxymore. De façon schématique, on peut dire que, si le système scolastique de la foi s’organise autour de deux pôles, la fiducia et la discretio, la question de l’ignorance soulève de son côté le problème du rapport entre l’intériorité du croyant et la régulation sociale des actes, dans leur extériorité, par l’Eglise. L’enquête commencera par examiner l’élaboration de la notion d’ignorance invincible par Pierre Abélard (1079-1142), puis proposera une vue cavalière des usages casuistiques de ce concept au XIIIe siècle. Puis, on s’attachera aux positions de Robert Holcot (fl. 1333) qui par leur radicalité sont symptomatiques d’un bouleversement dans la conception de la foi : la dimension fiduciaire de la foi voit son poids augmenter mais en même temps, elle est inscrite dans une perspective que l’on pourrait dire internaliste, où ce n’est plus l’Eglise comme institution mais les commandements de la conscience, qui règlent cette confiance dans le soutien divin. De ce fait, on espère pouvoir poser quelques jalons pour une généalogie intellectuelle de la Réforme.
11:00 à 11:45
Colloque
Que m'est-il permis d'ignorer ? La foi, l'ignorance et les limites acceptables de l'orthodoxie
Christophe Grellard
11:00 à 11:45