Présentation de la chaire
Arsène d’Arsonval est élu à la chaire de médecine en 1894, au décès de Charles-Édouard Brown-Séquard, dont il est le suppléant depuis 1888, après avoir été son préparateur de 1878 à 1887. Tout son enseignement et sa recherche portent sur l’électricité médicale, discipline dont il est un des fondateurs, reconnu au plan international, au point que le nouveau type de thérapie électrique qu’il élabore est dénommé en France comme à l’étranger darsonvalisation.
De 1887 à 1894, il enseigne au Collège de France l’influence de l’électricité sur les êtres vivants. En 1895, ses cours traitent des Applications de l’électricité sur les êtres vivants, et en 1899, ils portent sur les principaux phénomènes de l’électro-biologie.
Les recherches et l’enseignement d’Arsène d’Arsonval illustrent l'interaction complexe entre les sciences, l’industrie et la médecine, dans le contexte de la seconde révolution industrielle, de 1850 à 1914, s’articulant principalement autour de l’électricité et de l’industrie chimique et pétrolière : d’Arsonval s'appuie en effet sur les progrès de la physique et des techniques contemporaines pour créer des instruments innovants destinés à la connaissance du corps humain comme au développement de l’électrothérapie. C’est un inventeur prolifique qui dépose un nombre de brevets impressionnant.
Arsène d’Arsonval s'intéresse d’abord au téléphone dans le cadre de ses recherches de physiologie sur les muscles et l’électricité animale puis, dans le cadre de ses travaux sur la surdité, comme moyen de recueillir les vibrations sonores à distance du locuteur et de les amplifier : il adapte donc le téléphone tout juste breveté par Alexander Graham Bell, en collaboration avec le physiologiste et homme politique Paul Bert (1830-1886), ancien élève de Claude Bernard. En 1882, d’Arsonval et Bert brevètent leur premier « nouveau système de téléphone ». L’année suivante, d’Arsonval utilise le microphone comme « myophone » pour étudier les vibrations du muscle à l’état de contraction et au repos, et démontre sa réponse systématique aux excitations électriques. Une série d’améliorations brevetées de ces récepteurs et émetteurs ont été incorporées dans les réseaux téléphoniques de l’État et ont été utilisées pendant plusieurs décennies.
En 1890, inspiré par les expériences de Tesla, Arsène d’Arsonval recherche les effets thérapeutiques des hautes fréquences, qui selon lui produisent un effet analgésique, une dilatation vasculaire ou encore une augmentation de la combustion organique. Il met au point plusieurs moyens d'appliquer ces courants, y gagne une notoriété internationale et en fait le sujet de son enseignement. Jugeant avoir ainsi accompli son œuvre de physiologiste, il estime qu’il revient aux médecins d’en étudier et d’exploiter le potentiel thérapeutique.
Si, rétrospectivement, les traitements électriques de d’Arsonval semblent avoir été peu efficaces, ils ont cependant joué un rôle important dans le développement de la science médicale. En effet, de plus en plus de médecins de l’époque apprennent la physique biologique et l'électricité médicale, tandis que de grands fabricants d'instruments se spécialisent dans la production de matériel médical. Le contexte créé par l'électrothérapie permet la réception et le déploiement rapide des rayons X peu après leur découverte en 1895.