Des désoxyribo- et ribo-nucléosides chimiquement modifiés et dérivés de l’adénosine, la guanosine, la cytidine, la thymidine ou l’uridine, sont trouvés dans tous les types d’acides nucléiques. À ce jour, 26 nucléosides modifiés (non canoniques) ont été identifiés dans l’ADN et 107 dans l’ARN. Ils sont particulièrement abondants dans les ARN non codants, tels que les ARN de transfertet les ARN de ribosomes, notamment des métazoaires. En augmentant la diversité structurale des acides nucléiques, ils jouent un rôle important pour l’expression des gènes et la régulation fine de diverses fonctions des ARN, notamment de la traduction génétique. Ils contribuent aussi à la stabilité thermique et à la protection des acides nucléiques contre l’action des nucléases ainsi que l’agression des virus. Dans une cellule, le nombre et la diversité des enzymes requises pour modifier sélectivement certains nucléosides des ARN ou ADN, ainsi que pour générer la même modification mais en des sites distincts d’un acide nucléique est très élevée. Le problème est de comprendre : i) quand et pourquoi ces nombreuses enzymes ont émergé et évolué depuis que la vie est apparue sur terre ; ii) où elles sont localisées dans les cellules contemporaines (libres ou associées à d’autres composants cellulaires) et comment elles fonctionnent (mécanisme et spécificité).
Nous attirons plus spécialement l’attention sur le type et la fonction des nucléosides modifiés qui sont présents dans l’anticodon des ARN de transfert. Certains de ces nucléosides modifiés (et leurs enzymes de modification correspondantes) sont très anciens, alors que d’autres ont émergé plus tardivement au cours de l’évolution. La nécessité d’une traduction génétique en phase et hautement précise au niveau du complexe ribosome-RNA messager, l’introduction progressive des 20 + 2 acides aminés canoniques et la convergence progressive vers un code génétique quasiment universel, permettant des synergies d’évolution combinatoires entre les différentes espèces des trois domaines de vie, sont parmi les contraintes évolutives les plus importantes.
Pour obtenir des informations générales ou détaillées concernant la découverte, les propriétés biochimiques et physiques des enzymes de modification et édition des acides nucléiques (ADN ou ARN) identifiés jusqu’à présent, le lecteur peut se référer à plusieurs chapitres écrit (en anglais) par des spécialistes dans les livres suivants :
- Grosjean H. (éd), DNA and RNA modification Enzymes: Structure, Mechanism, Function and Evolution, Austin (Texas), Landes Bioscience, 2009 (http://www.landesbioscience.com/curiechapter/4181/).
- Grosjean H. (éd), Fine-Tuning of RNA Functions by Modification and Editing, Berlin-Heidelberg, Springer-Verlag, 2005 (http://www.springerlink.com/content/?k=RNA+Modification+Editing).
- Grosjean H. et Benne R.(éd.), Modification and Editing of RNA, Washington-DC, ASM Press, 1998.
- Grosjean H., de Crécy-Lagard V. et Marck C., « Deciphering synonymous codons in the three domains of Life: Co-evolution with specific tRNA modification enzymes », FEBS Letters, a Special Issue on tRNA, 584, 2010, 252-264.