Résumé
John Maynard Keynes, dans son Treatise on Probability (1921), distingue clairement l'incertitude et le risque, le risque étant de l'incertitude complètement structurée par des probabilités objectives. En baptisant « principe d'incertitude » le fameux principe qu'il a mis au cœur de la mécanique quantique, Heisenberg a ignoré la distinction keynésienne. La mécanique quantique en effet, tout en écartant la causalité déterministe, caractérise tous les phénomènes physiques de son ressort en termes de distributions complètes de probabilités objectives.
En revanche, des sciences comme l'écologie, la climatologie, l'océanographie et, à bien des égards, la science médicale sont au moins partiellement des sciences incertaines au sens de Keynes. Cela ne les rend pas inaptes à éclairer des décisions collectives dont les conséquences peuvent être lourdes, dans la mesure où des méthodes rigoureuses ont été développées à cet effet – et expérimentées – dans un passé récent. Mais cela les rend vulnérables à des manipulations de l'incertitude qu'elles comportent, manipulations qui visent à les discréditer dans leur capacité à éclairer les décisions à prendre.