Le séminaire de l’année 2009-2010, mené conjointement avec M. Stéphane Feuillas, maître de conférences à l’université Paris 7, a été consacré à une introduction à la lecture du Classique du changement (Zhouyi 周易). Les premières séances ont tenté, à partir du « Grand commentaire sur les formules attachées » (Xici dazhuan 繋辤大傳) datant de la fin du IIIe siècle av. J.-C., de mettre en lumière le champ d’application de l’ouvrage : l’anticipation des situations par la divination, la compréhension de la transformation naturelle, l’ajustement aux situations qui caractérise la conduite de l’homme de bien et le rôle des hexagrammes dans l’organisation et la création de l’espace social, politique et culturel chinois.
Ces quatre points laissent entendre que le livre, dans son agencement, est parfaitement homologue au cosmos (tiandi 天地) et que ce qui est dit d’un hexagramme renvoie à la philosophie première, à la morale ou à la politique.
Ce préalable ayant été corroboré par différentes lectures du « Grand commentaire » de la dynastie des Han (206 av. J.-C.-220 ap. J.-C.) jusqu’aux Song (960-1279), une hypothèse a été formulée : toute procédure herméneutique concernant la structure du livre, la composition des hexagrammes et leur transformation en d’autres signes induit une philosophie générale du changement. Autrement dit, les choix interprétatifs et l’invention dont font preuve les commentateurs pour expliciter les différentes formules oraculaires ou la mutation des figures, ne servent pas seulement à traduire dans une langue plus intelligible les sentences cryptées et sibyllines, mais déterminent une conception originale de la transformation.
À partir de cette hypothèse, nous avons introduit une procédure : la modification hexagrammatique (guabian 卦變), technique qui pose que tout signe de six lignes est issu de la transformation d’un autre signe, choisie à cause des débats qu’elle a suscités dans l’histoire commentariale du Classique du changement. Pour aborder cette notion, nous avons commencé de lire un long texte de Zhu Zhen朱震 (1072-1138) extrait de son commentaire, le Hanshang Yizhuan 漢上易傳, qui passe en revue les différentes significations qu’il faut donner à ce terme.