- Quentin Deluermoz – Paris, 1871, une expérience communale au siècle de la modernisation
- Claire Judde de Larivière – Le travail comme fabrique du commun : la communauté de Murano à la fin du Moyen Âge
- Guillaume Mazeau – Communes en miroir (1789-1792-1871)
- Riccardo Ciavollela – Traduire les mouvements populaires d'hier et d'aujourd'hui, d'ailleurs et d'ici
Interventions
On a longtemps envisagé l’insurrection parisienne de 1871 – accompagnée des révoltes d’autres villes métropolitaines et coloniales – comme la première des révolutions socialistes « modernes », événement urbain singulier dont le spontanéisme ferait la valeur. Cette séance entend revenir sur sa signification et sa portée, mais dans une toute autre perspective. D’abord en se centrant sur la notion « d’expérience » qui donne son titre à l’ensemble du séminaire. Elle sera entendue ici, pour cette révolution ancrée dans le XIXe siècle, dit de la « modernité », comme expérience temporelle (soit la manière dont l’histoire vient frapper la conscience des acteurs) ; comme expérience sensible (modifiant, dans l’évènement, l’environnement symbolique, affectuel et sensoriel) ; et enfin au sens d’expérimentations sociales et politiques, étant entendu que ces trois dimensions sont indissociables. On procédera par croisement avec d’autres expériences – révolte ou élaboration d’ordres sociaux alternatifs –, sur un ou plusieurs de ces aspects. Il s’agira tout à la fois d’entreprendre un exercice de comparaison permettant de cerner les distances temporelles, les effets de la longue durée ou la proximité des situations de crise ou de révolution. Mais on tâchera de voir aussi la manière dont les communards se situent dans l’histoire, mobilisent le passé et ses potentialités pour donner sens à leur action, puis la façon dont la Commune devient à son tour une référence chargée de promesses en d’autres temps ou lieux.
Enfin on posera le problème de la traductibilité des expériences historiques révolutionnaires, qui apparaissent souvent irréductibles. Seront ainsi mises en relations avec la Commune de 1871 les villes italiennes du XVIe siècle, la Commune de Paris de 1792, et dans une perspective plus anthropologique les formes d’ « alter-politique » observables dans le monde contemporain, en perspective avec les réflexions du philosophe Antonio Gramsci. Tout en se confrontant aux problèmes classiques mais redoutables de l’homologie et de la singularité, de la discontinuité et de la répétition, on tentera ainsi de réfléchir collectivement à ce qui s’est passé pendant la Commune de Paris, à la rupture dans l’ordre du sens qu’elle a provoqué comme aux interprétations croisées qui peuvent en être faites aujourd’hui. Soit une manière de revenir sur la part du « commun » de la Commune.