Résumé
Présentation d’un argument sur la relation entre la société de consommation, telle qu’elle s’est développée au cours du dix-huitième siècle, et l’écriture des Lumières. Je suggère que la culture de soi liée aux pratiques de la consommation a inspiré chez les auteurs de l’époque de nouvelles stratégies d’écriture, illustrées par le mot de Voltaire : « Les livres les plus utiles sont ceux dont le lecteur fait lui-même la moitié ». On peut caractériser ces stratégies comme des stratégies d’ambiguïté. Les lecteurs doivent déchiffrer des puzzles, dénouer des paradoxes, trouver une logique soutenant une chaîne de textes discontinus. Ils sont ainsi encouragés à créer leurs propres significations et à entrer dans des dialogues imaginaires (ou parfois réels) avec les auteurs, ce qui les invite à se recréer et à faire des choix perçus comme libres. Je discute les parallèles entre cet exercice de choix et celui fait dans la société de consommation, non pas pour insister que les Lumières soient le simple produit de changements économiques, mais pour explorer la relation complexe et parfois quasi-symbiotique entre les deux.