La chaire Archéologie paléochrétienne et byzantine est créée le 18 février 1946 par transformation de la chaire Langues, histoire et archéologie de l'Asie centrale et reprend les activités menées par Gabriel Millet de 1926 à 1937. André Grabar, élu en 1946, avait d’ailleurs déjà succédé à Gabriel Millet à l’École pratique des hautes études en 1937. Son enseignement présente plusieurs caractéristiques, notamment celle d’une très grande ouverture à l’international qui l’amène hors de France pendant plusieurs mois chaque année jusqu’à sa retraite en 1966. Très lié à l’Institut d’études byzantines Dumbarton Oaks de Harvard dès 1947, il met à profit sa chaire pour favoriser les collaborations entre chercheurs à l’occasion de publications de sources ou de chantiers archéologiques. Il participe également à de nombreuses activités scientifiques avec l’Europe centrale ou orientale, ainsi que dans le monde slave. Ces rencontres intellectuelles l’amènent à naturellement envisager l’Empire byzantin comme un monde pluriel en étudiant particulièrement les usages et les caractéristiques formelles issus de Syrie, des Balkans ou du monde russe.
Ses recherches le conduisent également à considérer les liens entre les monuments et l’univers intellectuel des hommes du passé. Attentif aux préoccupations religieuses, il met en évidence par exemple le culte des reliques dans la structuration de l’art et l’architecture byzantines, et s’il ne nie pas les influences étrangères, il s’efforce de montrer que s’élabore pendant un millénaire un univers intellectuel tout à fait nouveau et qui concerne la conception de l’État et du monde. Grabar inscrit son enseignement au Collège de France dans la suite de ses ouvrages L’Empereur dans l’art byzantin (1936) ou Martyrium (1943-1946) dans lesquels il s’attachait déjà aux monuments « inspirés par une croyance ». L’incipit de ce dernier livre constitue comme un emblème : « comme la relique, l’empereur qui est à la fois homme et Dieu appartient simultanément au sensible et à l’intelligible ».
Acteur de la création, au Collège de France, de la chaire Psychologie des arts plastiques (1949), il centre ses enseignements et ses recherches sur les liens entre art et littérature, en ce qu’ils peuvent enseigner sur la conception des images, des objets ou des cérémoniels. Il relie par exemple l’art impérial aux interprétations littéraires et est l’un des premiers à considérer les hagiographies comme des sources révélatrices sur les conceptions du monde ancien.
Notice rédigée par Marc Verdure (Collège de France – Institut des Civilisations).